Julia R.
 
 
Le déjeuner se passa dans un calme approximatif. Abby restait silencieuse et renfrognée, ne levant pas les yeux de son assiette.
-Combien de temps restez-vous en ville? Demanda James à la fin du repas.
-Le week-end, répondit Frank, Denise avait envie de visiter la ville.
-Ca ne ressemble pas à Charleston, c’est certain, ria Anny.
-L’air est plus étouffant, ajouta Abby en grognant, et Charleston est un ville beaucoup plus belle.
Anny ne prêta pas attention à la remarque de sa fille et reprit la parole.
-Il est certain que ça va vous changer.
-J’ai pu voir des endroits si différents, lança Denise, le fait de voyager constamment n’est pas toujours une mauvaise chose.
-Je ne l’ai pas aimé, répondit Anny, Frank, toi tu aimais bien, c’est pour ça que tu es devenu comme papa.
-Ne revenons pas là-dessus, dit Frank, nous ne sommes pas là pour parler de ça.
-Oui, vous êtes revenu me ramener notre petite sauvageonne.
-Anny, soupira James.
-Non, voyons il faut dire ce qui est chéri. Mon frère fait toujours ce qu’il faut.
Frank ne répondit pas mais la main de Denise se saisit de la sienne et la serra avec force. Elle lui lança un regard tout en restant silencieuse. Il n’avait pas besoin d’entendre le moindre mot, il avait compris. Il acquiesça discrètement et resserra ses doigts par une légère pression avant de s’adresser avec calme, sur un ton posé.
-Nous ne sommes pas venus te ramener Abby. Nous sommes venus pour discuter d’une chose importante qui la concerne.
-Quoi donc?
-Ne le coupe pas Anny, intervint James, j‘aimerai savoir ce qu‘il a à dire.
Son épouse lui adressa un regard et acquiesça. Abby leva enfin la tête et les regarda tour à tour. Elle savait que le moment était venu, mais pourtant, elle sentait la tension qu’éprouvait son oncle. Si elle devait se montrer courageuse, c’était maintenant ou jamais. Alors elle se redressa sur sa chaise et respira profondément.
-J’ai envie de vivre avec tonton et tata, lâcha-t-elle en un souffle.
-Tu plaisantes? Ria Anny.
-Non, reprit Frank, elle ne plaisante pas. Nous y avons bien réfléchi, et cette solution est sans doute la meilleure pour tout le monde.
-Je ne suis pas d’accord, elle est notre fille et non la tienne. Tu n’as pas à te l’approprier de cette manière.
-C’est son choix, reprit Frank, tu l’as entendu par toi-même.
-Elle ne sait pas ce qu’elle dit.
-Si maman, je suis loin d’être idiote figure-toi.
-Abby ne te mêle pas de ça.
-Ca me concerne un peu tu ne crois pas?
-Si on t’écoutait tout te concernerait.
-Si tu m’écoutais, je ne serais pas là à te demander de laisser Frank et Denise s’occuper de moi, rétorqua la jeune fille. Et puis d’abords tu t’enfiche totalement de moi, alors qu’est-ce que ça peut te faire?
-Abby, murmura Denise, s’il te plait calme-toi.
-Tu crois qu’il suffit de lui dire ça gentiment pour qu’elle t’écoute? Décidément, vous vivez sur une autre planète.
Abby lui lança un regard noir et se radoucis en croisant celui de sa tante.
-Peut être, murmura Abby, mais je préfère de loin la leur que la tienne maman.
Ils restèrent tous silencieux un moment avant que James ne prenne la parole à son tour.
-Qu’est-ce que vous proposez? La garder le temps de l’été?
-Plus longtemps James, répondit Frank, nous envisageons de demander sa garde.
-C’est de la folie, lança Anny en se levant brusquement. Vous avez perdu la tête tous les deux, et toi Denise, tu les soutiens? Tu ne connais pas Abby, tu ne sais pas comment il faut s’occuper d’elle et Frank cherche toujours à vouloir être parfait. Tu devrais le savoir depuis le temps que vous êtes mariés. A moins qu’il t’a rendu comme lui?
-Ne mêle pas Denise à ça, rétorqua Frank en se levant lui aussi.
-Elle y est mêlé, j’estime que lorsqu’elle décide de m’enlever ma fille j’ai le droit de dire ce que je pense.
-Anny, gronda James, n’exagère pas.
-Parce que toi tu approuve tout ça?
-Non, mais je ne m’attaque pas à Denise pour autant.
-Anny, intervint celle-ci, je soutiens la décision de Frank parce que je la crois juste et ce n’est pas pour t’enlever Abby comme tu le pense. Je connais cette enfant depuis qu’elle est née et même si je ne l’ai pas vue grandir et que je ne suis pas sa mère, je l’aime et je ne veux que le meilleur pour elle.
-Qui mieux que sa mère peut s’occuper d’elle?
-Tu n’es pas en mesure de le faire correctement Anny, reprit Frank.
-Comment oses-tu dire ça?
-Je l’ai vu totalement perdue et déboussolée. Elle est venue seule jusque chez nous. Abby ne ressemblait en rien au souvenir que j’en avais d’elle.
-C’est une adolescente, c’est normal Frank. Si tu avais vu ton fils grandir au lieu de partir je ne sais où, tu saurais que c’est tout à fait normal.
-Ne me fais pas de reproches sur la manière dont j’ai fais ma vie.
-Alors n’en fait pas de même avec moi. J’élève mes enfants comme je l’entends, tu n’as pas à t’en mêler.
-Si Abby était heureuse, je ne le ferais pas Anny, crois-moi. Mais elle ne mérite pas d’être ignorée comme tu le fais. Elle a besoin d’une vraie famille, de personnes qui sachent l’écouter et l’entourer.
-Et tu t’en crois capable? Je t’en prie Frank. Rien ne passe avant ta carrière.
-Tu te trompe, elle est très importante pour moi, mais ma famille l’est encore plus. Je ne suis pas notre père Anny, comprends bien ça.
-Ca ne change rien, sanglota la jeune femme, Abby ne partira pas avec vous, je le refuse.
Elle échangea un dernier regard avant de se réfugier à l’intérieur. James la regarda partir et se tourna vers Denise et Frank.
-Comprenez la.
-Je peux la comprendre, admit Denise, je suis une mère qui ferait tout pour protéger mon enfant. Mais James, regarde la.
Elle désigna Abby et son père la regarda aussitôt avant d’accorder son attention au couple en face de lui.
-Je ne cherche pas à faire du mal à Anny, James, reprit Frank avec calme. Je ne cherche pas non plus à transformer ma nièce en parfait petit soldat docile. Je ne veux que son bien, nous le voulons tous.
-Je ne sais pas quoi vous dire, admit-il, je pense qu’il faudra qu’on en parle calmement. Laissez-nous du temps pour en prendre une décision.
-Papa, rétorqua Abby, s’il te plait.
-Je sui désolé Abby, ajouta-t-il en se levant avant de rejoindre la maison sans se retourner.
Les autres restèrent silencieux pendant plusieurs minutes, ne sachant vraiment comment réagir. Frank avait estimé qu’il était préférable pour tout le monde que sa sœur se calme avant qu’ils ne la voient à nouveau. Denise pouvait la comprendre d’un côté, mais elle savait également qu’elle faisait ce qu’il fallait. Elle avait vu la manière dont elles se parlaient et qu’Anny ne savait pas comment s’occuper de sa fille. Elle devait l’aimer, cela ne faisait aucun doute, sans cela elle n’aurait pas agit de la sorte, mais elle s’y prenait sans doute pas de la bonne manière, rendant tout le monde malheureux.

L’après midi se passa dans une étrange atmosphère. Denise et Frank avaient préféré laisser le couple seul. Ils avaient eu envie de voir un peu la ville, histoire de calmer les choses. Tim avait demandé s’il pouvait venir avec eux et sa sœur, qui refusait de rester à la maison de ses parents. Mais Denise et Frank avaient dû refuser, ne voulant pas envenimer les choses. Ils avaient même hésité à prendre Abby avec eux, mais celle-ci avait su se montrer persuasive et sa mère n’avait pas voulu leur adresser la parole pour le leur refuser. Ils avaient rejoins un parc et ils marchaient tranquillement sous les arbres.
-C’est foutu, soupira la jeune fille.
-Ne baisse pas les bras dès la première difficulté, répondit Frank, sinon tu ne risque pas de gagner la bataille.
-Ouais, facile à dire pour toi tu as l’habitude. Moi pas.
-C’est à chaque fois différent tu sais, reprit le Colonel. Mais il faut toujours se donner les moyens de réussir et se battre, à la guerre comme dans la vie.
-Je suis certaine que tes parents comprendront, intervint Denise, il faut qu’ils prennent le temps d’y réfléchir, c’est une sacrée décision tu sais.
-Je suis sûre qu’ils s’en contrefichent et qu’ils font semblants pour me pourrir la vie.
-Ne dis pas ça, murmura son oncle, ils ne veulent pas ton malheur.
-On parie? Grommela la jeune fille.
-Quoiqu’il en soit, soupira Denise, nous avons deux jours pour les convaincre et là, il se fait tard, nous devrions rentrer.
-Je ne préfère pas rentrer tata. Je n’ai pas envie de me retrouver face à eux et les entendre dire de sales trucs sur vous.
-Il va pourtant falloir le faire mademoiselle, reprit sa tante, nous n’allons pas disparaitre sans laisser de trace et te kidnapper, finit-elle en riant.
-Ca pourrait être sympa pourtant.
-On va éviter, répondit Frank.
-On pourrait rester à l’hôtel et je vous ferais visiter la ville, lança la jeune femme en souriant.
-Non Abby, répondit Frank, nous nous devons de parler avec tes parents.
-C’est déjà fait et ils ne veulent pas, alors autant en profiter, ou partir vite et loin.
-La fuite n’est pas une solution, même si tu aime beaucoup ça. Rentrons et tâchons d‘être courageux et forts tous les trois.
-Bien parlez soldat.
Denise sourit et déposa un baiser sur ses lèvres alors qu’Abby soupira profondément en levant les yeux au ciel.
-Allons au combat alors, mon Colonel.
Ils reprirent ainsi le chemin de la maison des Lewis où la tension s’était atténuée mais de loin pas dissipée totalement.
Ils trouvèrent le couple silencieux dans la cuisine et le petit garçon, jouant dans le jardin. Anny leur adressa à peine un regard alors que son époux prit timidement la parole.
-Ca été cette balade?
-Ouais, grommela Abby.
-C’est très beau, répondit Denise, nous sommes gâtés avec le beau temps.
-Oui, dit Anny, je monte me reposer, ajouta-t-elle avant de quitter la pièce.
Ceux qui restaient échangèrent un regard et Denise prit la parole.
-James, voudrais-tu que je prépare le souper?
-Je n’y vois pas d’inconvénients et Anny ne devrait pas en être inquiétée.
Denise fronça les sourcils et Abby traduisit ce que voulait dire son père.
-Quand maman est fâchée, vexée, en colère ou un truc du genre, elle dit qu’elle va se reposer et ne compte pas ressortir de la chambre ou du bureau avant des heures. Le repas, il ne vaut mieux pas compter dessus. Ne t’inquiète pas, elle s’enfichera totalement si tu le fais à sa place. Je peux te donner un coup de main si tu veux.
-Tu cuisine maintenant? Lança son père.
-Denise m’a appris deux ou trois trucs sympa.
-Oh, soupira James, eh bien, allez-y je vous en prie.
Denise et Abby échangèrent un regard et se dirigèrent vers le plan de travail. Frank quant à lui suivit son beau-frère dans le salon. Pourtant, ils n’échangèrent presque aucun mot. Par quoi pouvaient-ils commencer? Comment pouvaient-ils aborder le sujet délicat pour lequel ils se trouvaient là?
Ils parlèrent un peu de Jeremy et de leur famille. Puis, quelques minutes plus tard Abby entra dans la pièce pour les appeler afin de se mettre à table. James alla chercher son épouse à l’étage et ils rejoignirent la cuisine.
-Il ne te suffit pas d’avoir ma fille? Tu souhaite ma maison aussi? Grogna la jeune femme à la seconde.
-Je voulais te donner un coup de main Anny, se justifia Denise.
-D’habitude tu t’enfiche maman, murmura Abby, tu ne vas pas nous faire une crise.
-Je pense que tu es mal placée pour ouvrir la bouche demoiselle.
-Ouais, c’est ça. Je la boucle.
-Je suis désolée, si j’avais su que…
-Ne chercha pas d’excuses Denise, coupa Anny.
-Chérie, ajouta James, c’est moi qui leur ai dit qu’elles pouvaient. En général…
-C’est bon, je me tais moi aussi, soupira son épouse en croisant les bras sur sa poitrine, vous avez tous décidé que j’avais tort alors ne revenons pas là-dessus.
Les deux hommes échangèrent un regard alors que James haussa les épaules un court instant. Denise servit tout le monde et ils mangèrent en silence. Une fois encore la tension était plus que palpable et seul Tim ne semblait pas s’en soucier jusqu’au moment où sa mère le gronda pour avoir donné une part de son repas au chien.
Une fois le repas terminé et les assiettes presque toutes vides, Denise voulut débarrasser, mais Anny s’y opposa, devenant ainsi la parfaite maîtresse de maison qu’elle se devait d’être à la place de sa belle-sœur.
Denise prétexta vouloir prendre l’air et s’éclipsa dans le jardin déjà plongé dans le noir. Elle s’assit sur les marches en bois conduisant dans le jardin et regarda le ciel parsemé d’étoiles. Elle y resta de longues minutes en silence, perdue dans ses pensées. Elle entendit la porte de la cuisine s’ouvrir un court instant et des voix s’élever de la maison. Mais pourtant, elle ne bougea pas. Les pas lents s’approchèrent d’elle pour venir s’arrêter tout près. Elle vit une main lui tendre une bouteille de bière et elle la prit en regardant le visage de l’homme qui l’avait rejoins.
-A cette heure ci? Dit-elle avec étonnement.
-Je te l’offre, tu n’es pas obligé de la boire, répondit James en souriant.
-Mmmmh, je crois qu’elle ne va pas me faire de mal, répondit Denise de la même manière en l’ouvrant.
-Je me souvenais que tu aimais bien ça, répondit son beau frère en s’asseyant à côté d’elle.
-Entre autre, merci.
Il acquiesça et bu une gorgée alors que Denise en fit de même.
-C’est beaucoup plus calme ici, soupira James.
-Que se passe-t-il à l’intérieur? Je ne sais pas si j’ose y entrer.
-Je te le déconseille. Ils en sont à leurs affaires de jeunesse. J’ai préféré les laisser régler tout ça entre eux, ça ne me regarde pas et ça me donne franchement mal à la tête. Abby a filé dans sa chambre et Tim regarde la télévision.
Ils rirent tous les deux avant de rester silencieux un long moment. Puis, James reprit la parole à peine plus fort qu’un murmure.
-Denise, j’aimerai m’excuser pour la réaction d’Anny à ton égard.
-Ne t’en fais pas, je ne suis pas en sucre.
-Ca t’as pourtant touché.
La jeune femme haussa les épaules et fit une grimace avant de le regarder.
-J’ai connu pire. Et je peux la comprendre, je n’aimerai pas que quelqu’un vienne me dire comment élever mon fils et comment m’occuper de ma maison.
-Il n’empêche qu’elle a été odieuse. Et tu ne te comporte pas comme elle avec Abby.
-Abby n’est pas ma fille.
-Si tel était le cas, tu n’agirais pas comme Anny, je le sais.
-J’ai fais des erreurs avec Jeremy tu sais? Il a fait une tentative de suicide et aujourd’hui il est dans un centre pour se sortir de la dépression.
-Je l’ignorais, murmura James abasourdit.
-Nous n’en avons parlé à personne, en dehors de nos amis proches. Je me demande si je suis une bonne mère. Si je n’aurai pas dû faire plus. Frank pensait qu’il était trop dur avec lui, qu’il a raté quelque chose. Tu sais ce que c’est.
-Oooh oui. Je me demande tous les jours ce que j’ai mal fait pour ma fille. Lorsque je l’ai vue arriver avec vous, j’ai eu l’impression de voir la petite fille pleine de vie que je connaissais il y a des années. Très vite j’y ai reconnu ma petite rebelle, dit-il en riant, mais elle semblait plus sereine.
-Elle l’est.
-Rebelle ou sereine?
-Les deux, répondit Denise en riant, elle a besoin qu’on prenne soin d’elle James.
-Je le sais, je le sais, répéta l’homme en regarda l’immensité de velours, c’est pour cette raison que j’ai pris la décision de la laisser partir.
-La laisser partir? S’étonna la jeune femme.
-Elle est plus heureuse avec vous, même si Anny ne veut pas l’admettre, c’est la réalité. Et je n’ai pas envie de perdre définitivement ma fille. Je sais qu’elle m’a détesté et j’espère qu’un jour elle ne le fera plus.
-Elle ne te déteste pas, le rassura Denise, elle était totalement paumée c‘est tout. Elle a vécu l’indifférence des personnes qu’elle aime. Elle reviendra vers vous, j’en suis persuadée.
-Quoiqu’il en soit, je ne me m’oppose pas à votre demande et à la sienne. Elle peut être placée sous votre garde jusqu’à sa majorité si un juge l’accorde.
-Et Anny?
-Je me charge d’elle. Elle va s’y opposer avec violence, je la connais. Mais un avocat et un juge verront les faits, je ne peux pas nier que nous ne nous sommes pas occupé d’Abby comme nous l’aurions dû. J’espère ne pas faire les mêmes erreurs avec Tim.
-C’est le moment de prendre les choses en mains, il est encore jeune.
-J’ai l’impression qu’il est déjà trop tard.
-J’en doute, retiens la leçon et tout ira bien.
-C’est pour cette raison que je souhaite que ma fille vive avec vous.
-Je te remercie d’accepter James. Elle compte beaucoup pour nous et nous ne voulons que son bonheur.
-Vous comptez beaucoup pour elle aussi, je l’ai toujours su. Je préfère qu’elle soit avec vous plutôt que de traîner dans la rue avec des gens parfois douteux.
-Tu m’en vois ravie, ria Denise.
-Tu as parfaitement compris, rit James à son tour.
Denise lui sourit et bu une autre gorgée. Ils discutèrent encore de longues minutes. Aucun des deux ne voulaient rentrer dans la maison et se confronter à leur conjoins sans doute encore sous tension. Mais bien de longues minutes plus tard, ils se décidèrent enfin. Ils trouvèrent Anny dans son bureau, Frank dans le salon avec Tim et Abby dans sa chambre, un casque sur les oreilles. Denise et Frank décidèrent de rejoindre l’hôtel plutôt que de rester dans la chambre d’amis. Ils ne voulaient pas tenter le diable et demandèrent à Abby de rester chez ses parents pour la nuit. Ils passeraient la journée du lendemain seuls et reviendraient voir la famille le dernier jour afin de régler les derniers détails avant leur départ.

La journée suivante avait été longue et éprouvante pour la jeune fille qui avait juré de ne pas quitter sa famille. Elle avait tout de même téléphoné plus d’une fois à sa tante. Celle-ci lui avait demandé de faire d’énormes efforts si elle voulait pouvoir venir vivre avec eux. Elle ne lui demandait qu’un jour à se tenir tranquille. Ce qu’Abby fit, avec beaucoup de difficulté.
Ils la trouvèrent devant leur hôtel en rentrant du restaurant dans lequel ils avaient dîné.
-Qu’est-ce que tu fais ici Abby? Gronda Frank.
-S’il te plait, je veux rester avec vous.
-On ne te demande qu’un jour.
-Oui, ben la journée est finie là., grommela la jeune fille.
-Tes parents savent que tu es ici?
-Je pense pas, dit-elle en faisant la moue.
-Alors rentre immédiatement, lança son oncle, s’ils voient que tu ne nous écoute pas, je doute que tu puisses passer un jour de plus avec nous.
-Mais…
-Je te ramène tout de suite, coupa le Lieutenant-colonel en l’entrainant avec lui vers la voiture.
Denise n’eut pas le temps de dire quoique se soit qu’ils montèrent déjà dans le véhicule. Frank se retourna au dernier moment et lui sourit timidement.
-Je la dépose et je reviens, s’expliqua-t-il.
-A plus tard, répondit Denise alors qu’il s’assit et ferma la portière aussitôt après.
Elle regarda la voiture démarrer et entra dans le bâtiment avant de rejoindre la chambre et d’attendre que son époux ne rentre. Il le fit une bonne heure plus tard, lui racontant ce qu’il s’était passé. Abby avait tout simplement fait la belle par la fenêtre de sa chambre, comme elle l’avait fait des milliers de fois, et rien n’indiquait que ses parents avaient été mis au courant de sa petite escapade. La raison aurait voulu que Frank le signal et la fasse rentrer par la porte d’entrée. Mais il savait aussi bien que sa nièce ce que cette nouvelle impliquerait. C’est pourquoi, il l’avait laissé regagner sa chambre comme elle l’avait quittée, veillant tout de même à attendre qu’elle ait quitté l’arbre sur lequel elle était montée avant de lui faire remarquer l’inconscience dont elle faisait preuve. Mais il n’osait pas en ajouter davantage, gardant son sermon pour le lendemain de peur qu’on ne le surprenne complice de sa nièce, ce qui pouvait s’avérer encore bien pire.
Denise et Frank quittèrent tôt leur hôtel le lendemain. Ils arrivèrent à la maison des Lewis et furent surpris de trouver une dizaine de valises et de sacs de différentes tailles dans l’entrée ainsi qu’une Abby tout sourire.
-Ils ont dit oui, s’exclama-t-elle, on peut y aller.
-Une minute, l’arrêta Frank alors qu’elle prenait déjà plusieurs bagages, je veux parler à tes parents avant, tu permets?
-Tu ne me crois pas c’est ça?
-Je n’ai pas dit ça, mais ils doivent quand même savoir que tu es partie, tu ne crois-pas?
-Ouais, grommela Abby.
-Je t’aiderai à mettre tes affaires dans la voiture après, intervint Denise en souriant à la jeune fille.
Elle lui sourit en retour et rejoignit le salon où se trouvaient ses parents. Ils se faisaient face, mais restaient silencieux. Le couple entra à la suite de la jeune fille et ils échangèrent tous un regard avant que Frank ne prit la parole.
-Je vois que tu as pris ta décision Anny.
-Je ne l’approuve pas, mais je m’en contente. Je me suis un peu renseignée, il faudra encore une longue procédure pour que ma fille soit considérée comme la vôtre. Et je suis certaine qu’un juge choisira sa mère à son oncle et sa tante. Alors, je ne me fais pas beaucoup de soucis. Mais j’ai prévenu Abby, qu’elle profite de ces longues vacances, parce qu’à son retour je ne risque pas d’être aussi indulgente que je le suis.
-Indulgente? Tu te fous de moi?
-Abby, murmura Denise en lui lançant un regard.
Elle fit une grimace et se tût aussitôt.
-Merci Anny, répondit Frank, c’est la meilleure des solutions pour ta fille.
-Tu n’as pas encore gagné Frank, répondit-elle sur un ton sec.
-Je ne cherche pas à le faire, surtout si je savais que ma nièce est heureuse et en sécurité.
Ils échangèrent un regard mais restèrent silencieux. James quant à lui, tendit la main vers sa fille et lui parla doucement.
-Viens au moins me dire au revoir demoiselle.
Abby s’approcha et se serra dans ses bras.
-Merci papa, murmura-t-elle.
Il caressa ses cheveux et déposa un baiser sur le haut de sa tête en souriant.
-Ne nous oublie pas quand même et ne fais pas trop de bêtises chérie, s’il te plait.
-C’est pas facile d’en faire chez tonton, rétorqua la jeune fille en se redressant.
-Alors c’est une bonne chose, ajouta-t-il en caressant tendrement son nez.
Abby lui sourit et s’éloigna.
-Tu éviteras de les rendre complètement dingues d’accord? Lança sa mère. Je n’ai pas envie de te chercher en prison où je ne sais où.
-Ouais.
-Bien, alors, bonne route à vous et on se tient au courant pour la suite. Au revoir.
Abby ne répondit pas et sortit comme une fusée de la pièce. Elle prit ses affaires et ouvrit la porte. Les adultes la suivirent aussitôt et Denise et Frank prirent au passage quelques affaires.
-Dis au revoir à ta mère, murmura Frank.
Ils déposèrent les affaires dans le coffre et la jeune fille se dirigea à nouveau vers la maison pour prendre le dernier sac que lui tendait son père.
-Salut maman, grommela-t-elle sans avoir de réponse.
Elle regarda la maison une dernière fois avant de se diriger vers la voiture à nouveau. Mais à mi-chemin, elle sentit un boulet de canon se jeter contre elle et lui serrer la taille. Tim leva les yeux vers elle et elle lui sourit timidement.
-Salut crapaud.
-Tu pars?
-Ouais, je vais vivre avec tonton et tata. Tu auras papa et maman pour toi tout seul.
-Mais tu ne reviens plus?
-Non, tu imagine? Tu auras la belle vie. Et plus de grande sœur à te prendre la tête. Tu as le droit de bousiller tout ce que tu veux dans ma chambre.
Tim fit la moue et regarda le sol. Alors Abby lâcha son sac et se mis à genoux devant lui.
-Hey, on se reverra tu sais. Je ne sais pas quand encore, mais un jour je suis sûre. Tu reste mon frère, même si ce n’est plus papa et maman qui s’occupent de moi.
Elle lui sourit et le prit dans ses bras un moment, puis elle se releva à nouveau.
-Ne fais pas trop de bêtises et ne rends pas dingues les parents, ok?
-Oui.
-Salut crapaud.
-Je suis pas un crapaud.
Abby rit et se dirigea vers la voiture où l’attendaient Denise et Frank. Elle adressa un dernier signe de la main à son frère qui le lui rendit ainsi qu’un bref mouvement de tête à ses parents. Sa mère n’avait pas voulu lui dire plus que ce qu’elle avait déjà fait, elle ne l’avait pas prise dans ses bras, ni même lui souhaiter bonne chance. Mais Abby s’enfichait, elle avait un petit frère qu’elle aimait malgré toutes les disputes, et il tenait à elle aussi. Son père aussi semblait un peu triste de la voir partir, alors elle était soulagée. Elle comptait pour eux au moins.
Ils montèrent tous les trois en voiture et Frank démarra. Ils adressèrent des signes de la mains encore quelques instants avant de passer l’angle de la rue. Abby sentit son cœur encore lourd tout le temps du trajet pour sortir de la ville. Mais une fois sur la route qui s’en éloignait, elle sourit à nouveau. Même s’il restait encore des choses à régler, et non des moindres, le premier pas était fait et elle voulait s’en réjouir. Tout comme Denise et Frank.


La route du retour se fit de manière plus sereine. Tous les trois étaient soulagés après avoir définitivement quitté Pittsburg. Le soleil les accompagnait sur le chemin du retour pour Charleston. Abby avait décidé de lâcher son I-Pod si son oncle mettait de la musique « sympa ». Elle fut surprise de constater que les goûts du Lieutenant-colonel n’étaient pas aussi désastreux qu’elle l’aurait pensé.
Ils s’arrêtèrent encore plusieurs fois en route avant d’arriver. Denise en profita pour téléphoner à Jeremy. Ils avaient eu l’accord de venir le voir tous les trois, car le jeune homme allait mieux de jour en jour et il n’était encore question que d’un peu de temps avant qu’il ne puisse rentrer dans sa famille. Cette famille qui, justement, s’agrandissait de manière inhabituelle. Denise, Frank et Abby déjeunèrent à un restaurant donnant sur le lac et prirent la voiture pour aller voir Jeremy.
Lorsqu’ils le virent, Abby courra aussitôt dans sa direction et se jeta dans ses bras. Il fut surpris un instant avant de lui sourire en resserrant ses bras autour d‘elle.
-Qu’est-ce que tu fais là toi? Je me souviens plus t’avoir vu depuis un moment.
-Je suis ta sœur t‘as oublié? Répondit Abby en souriant, tu vas devoir prendre l’habitude de me voir.
-On était frère et sœur à sept ou huit ans, on a grandit depuis je crois.
-Ouais, mais cette fois c’est pour de vrai. Je ne vais plus vous lâcher.
-C’est quoi cette blague? Demanda le jeune homme alors que ses parents approchaient et qu’il se libérait de l’étreinte de la jeune fille.
-C’est compliqué, murmura Denise, comment tu vas?
-Ca va, répondit Jeremy alors que sa mère déposa un baiser sur sa joue.
-Salut, lança Frank en le prenant contre lui un instant.
-Salut papa. Je ne pensais pas vous voir aujourd’hui.
-C’est parce qu’on a une grande nouvelle à t’annoncer, lança Abby.
Jeremy fronça les sourcils et se tourna vers elle.
-Genre? Que tu es ma sœur, c‘est ça?
-Ouais, c’est ça.
-J’ai raté un épisode?
-Des tas, soupira Abby en levant les yeux au ciel. On s’est plus vu depuis que j’avais dix ans, il s’en est passé des choses.
-Je demande seulement le chapitre qui dit que tu es devenu ma sœur, t’étale pas sur le sujet.
Denise et Frank échangèrent un regard amusé et la jeune femme prit la parole.
-Abby va vivre avec nous de manière définitive. Nous devons encore arranger les choses pour avoir sa garde…
-Un truc banal et vite fait, coupa la jeune fille.
-Mais tout de même important, ajouta Frank avec sérieux. On doit voir un avocat et passer devant un juge.
-Tu trouve ça banal toi? Demanda le jeune homme à sa cousine.
-Au pire je peux toujours disparaître tu sais, il suffit…
-Personne ne disparaîtra, coupa Denise en faisant les gros yeux.
-Ils risquent de te chercher jusqu’en Alaska, je les connais, ajouta Jeremy à l’intention de la jeune fille.
-Oh oui, soupira celle-ci, j’ai compris, crois-moi.
-Bon, alors, ça vous dirait de m’expliquer? Fit plus fort Jeremy.
-Allons nous mettre dans le parc, répondit Denise en souriant, ça risque d‘être long.
Son fils acquiesça et elle le prit contre elle pour marcher de concert jusqu’au parc, suivit de près par Abby et Frank. Ils s’assirent tous les quatre sur un banc et racontèrent tout ce qu’il s’était passé. Jeremy avait écouté le plus calmement possible. Lorsqu’ils eurent fini, tous les trois le regardèrent en attendant sa réaction. Jeremy se contenta de les regarder tour à tour avant de faire une grimace.
-Il y a un truc qui cloche dans votre histoire, murmura-t-il sans lever les yeux de ses chaussures, et ça me pose problème.
-Qu’est-ce que c’est? Demanda Denise la gorge sèche.
-Abby vit à la maison en ce moment? Et depuis des mois à ce que j’ai compris?
-Oui, répondit simplement Frank.
-C’était ça le chamboulement?
-Oui, répondit Denise.
-Chamboulement? S’exclama Abby. Ah ben merci.
-Tu ne peux pas dire que c’était de tout repos, ria Frank.
La jeune fille fit une grimace mais ne répondit pas. Alors Jeremy reprit la parole.
-Tu dors où? Dit-il à sa cousine assise à côté de lui en levant la tête.
-Dans ta chambre.
-Et on fait comment quand je vais rentrer? T’imagine pas que je vais te laisser ma chambre, et j’espère que t’as pas touché mes affaires non plus.
-Ben t’as qu’à aller dans le garage, ou sinon on va t’acheter une niche si tu préfère, ajouta Abby en riant.
-Tu plaisante? Je rentre, je veux ma chambre, hors de question que tu t’y incruste.
-Tu rentre quand?
-Je ne sais pas, soupira le jeune homme, j’espère bientôt.
-Ca ne va plus tarder Jeremy, murmura Denise en caressant tendrement sa nuque, encore deux semaines peut être et tu reviendras à la maison avec nous. On s’arrangera pour ta chambre.
-J’espère, dit-il en souriant et en jetant un regard à Abby, en attendant, ne prends pas tes aises.
-Tu parles, j’ai déjà vu tout ce qu’il y avait à voir dans tes affaires, dit-elle en riant.
Il lui donna un coup de coude dans les côtes et Abby se calma un instant avant de lui en donner un à son tour et de rire avec lui.
Ils passèrent ainsi la fin d’après-midi tous les quatre dans une atmosphère légère et bonne enfant. Jeremy et Abby se taquinaient comme lorsqu’ils étaient enfants, ce qui présageait l’avenir bon mais aussi plus mouvementé qu’ils en avaient eu l’habitude. Denise et Frank allaient devoir s’organiser avec une adolescente et un jeune adulte à la maison, ils devraient sans doute en trouver une plus grande aussi afin d‘accueillir tout le monde. Mais tout cela prendrait du temps, car pour commencer, il fallait encore se battre pour que la jeune fille devienne officiellement et juridiquement la leur.

Trois semaines plus tard

Ce jour là, Denise et Frank avaient un jour de congé tous les deux. Et ce jour là, Jeremy rentrait chez lui. Ils devaient aller le chercher et ils avaient proposé à Abby de venir avec eux. Mais la jeune fille avait refusé. Elle voulait lui préparer une surprise pour son retour. Bien qu’apprenant cette annonce avec méfiance, le couple la laissa seule toute la journée, espérant ne pas trouver un cratère de la taille d’un immeuble à l’emplacement de leur maison à leur retour.
La jeune fille se mit au travail, sortant les meubles de la pièce, recouvrant ceux qu’elle ne pouvait pas déplacer et le sol avec des bâches qu’elle avait trouvé dans le garage. Elle avait réussit à aller en ville pour trouver des bidons de peintures qu’elle avait payé avec sa paie. Elle se souvenait parfaitement du vendeur qu’elle avait déjà vu lorsqu’elle avait repeins le bar de Roxy. Il put lui dire ce qu’elle devait prendre. La jeune fille avait caché les bidons comme elle avait pu plusieurs jours.
Une fois son oncle et sa tante partis, elle avait envoyé un message à Emmalin qui vint avec une de ses amies. Elles se mirent au travail en riant.
-Il va avoir une chambre d’enfer, commenta Abby en regardant le mur déjà en partie peint.
-Tu es sure que ton oncle et ta tante ne vont pas te tuer? Demanda Emmalin en faisant une grimace.
-C’est un peu tard pour faire marche arrière.
-J’aurai dû te poser la question avant de commencer, murmura Emmalin.
-De toute manière je l’aurai fait toute seule. Là au moins on s’éclate un peu.
-Tu le fais toute seule, n’oublie pas, rétorqua son amie, je ne casque pas pour toi. C’était la condition pour que je te donne un coup de main. Je déguerpis avant qu’ils ne rentrent, et je n’ai jamais été là.
-Tu me dois bien ça.
Emmalin leva les yeux au ciel en soupirant profondément.
-On va pas revenir là-dessus.
-La fois où tu as mis le feu au bar de l’amie de ta mère? Demanda l’autre jeune fille en souriant.
-Tu devrais faire attention à tes fréquentations Jennifer, ajouta Abby, tu te trouve avec une ancienne voleuse et fugueuse et , entre parenthèse encore bien pire, et une pyromane en puissance, dit-elle en riant.
-Merci de me prévenir seulement maintenant, répondit Jennifer en riant.
Emmalin lui tira la langue et elles se remirent toutes les trois au travail. La musique était aussi forte que dans une discothèque et les trois jeunes filles peignaient dans la joie et la bonne humeur. La chambre ne ressemblait en rien à ce qu’elle avait été le matin même. Du rouge, du noir, du gris et du bleu se trouvaient sur les murs. Elles firent une pause et s’assirent dans le jardin avec des boissons fraîches et de quoi grignoter. Une heure plus tard, le téléphone sonna. Abby décrocha en souriant mais fit une grimace en entendant la voix de son oncle à l’autre bout du fil.
-Tout ce passe bien? Demanda Frank.
-Super, répondit Abby en souriant, pourquoi ça ne se passerait pas bien?
-On ne sait jamais, répondit son oncle.
-Vous rentrez quand?
-Pourquoi?
-Pour me renseigner, ne t’inquiète pas.
-Si tu me pose cette question, je ne présage rien de bon. Qu’est-ce que tu as fais Abby?
-Je n’ai pas cramé la maison, se défendit celle-ci.
-Tu m’en vois ravi, grommela son oncle.
-Alors? Vous rentez quand?
-Justement, on ne va pas tarder.
-Vous ne voulez pas profiter de vous balader un peu tous les trois? Il fait super beau et tout…
-Abby, dans quel état je vais retrouver ma maison? Coupa le Lieutenant-colonel.
-Je te promets que ce n’est pas aussi terrible que tu le pense.
-Retiens-moi de t’étrangler quand on arrive si jamais tu as dérangé quoique se soit.
-J’oublierais pas, répondit la jeune fille, bon vous allez faire un tour alors? J’aimerai finir avant que Jeremy arrive.
-Je ne suis pas rassuré, crois-moi.
-J’en doute pas, mais s’il te plait, supplia-t-elle.
Elle l’entendit soupirer à l’autre bout du fil. Elle devinait qu’il devait se frotter le front en se demandant ce qu’elle lui réservait comme surprise désastreuse.
-Très bien, reprit Frank, on va faire un tour, mais je t’en prie, ne fais pas de bêtises.
-Promis, répondit Abby en souriant largement, à plus tard.
-A plus tard, répondit Frank avant de raccrocher.
La jeune fille en fit de même et se tourna vers ses deux amies.
-Allez les filles faut se bouger, ils n’en ont plus pour longtemps et on a encore beaucoup de boulot.
-N’oublie pas qu’on doit être parties avant, menaça Emmalin, je ne veux pas être mêlée à ton histoire. Et je le sens mal.
-Justement, on se dépêche alors, mon oncle a dit qu’ils allaient faire un tour avant de rentrer, mais je le connais, le tour risque de ne pas durer longtemps. Il soupçonne que je manigance quelque chose sur sa maison.
-Il te connait bien, dit Jennifer.
-T’imagine pas à quel point, répondit Abby.
Les trois amies se remirent au travail et une heure plus tard, Emmalin et Jennifer quittèrent Abby. Celle-ci avait encore du pain sur la planche pour que tout soit remis en ordre avant l’arrivée de sa famille. Comme elle l’avait prédit, ils rentrèrent tôt.
La jeune fille poussait un meuble contre le mur fraîchement peint et à peine sec au touché lorsque la porte d‘entrée s‘ouvrit et qu‘elle entendit des voix un peu plus loin.
Elle se redressa aussitôt et ferma la porte derrière elle avant de se diriger vers l’entrée en souriant.
-Salut, dit-elle de la même manière avant de se diriger vers le jeune homme.
-Salut, petite sœur c’est ça? Demanda Jeremy en souriant avant de la prendre dans les bras.
-Ouais, enfin on a pu voir l’avocat et tout, faudra encore attendre un bail avant que je sois ta petite sœur.
-T’es ma petite sœur, dit-il en déposant un baiser sur sa joue.
-Ils doivent venir voir ou je vis donc ce jour là, tu devras déguerpir et te trouver un hôtel, on fera comme si tu n’existais pas.
-Hors de question de mentir, répondit Denise, nous dirons que nous nous apprêtons à déménager, ce qui n’est pas faux.
-Ouais, soupira Abby.
-Je partirais t’inquiète pas, murmura Jeremy, je n’ai pas envie qu’ils ne t’accordent pas le droit de rester avec nous à cause de moi.
Ils se sourirent largement et Frank prit la parole avec plus de sérieux.
-Abby, tu n’as rien à dire?
-Si, j’ai fais une surprise pour ton retour, dit-elle avec entrain en regardant son cousin, bon, c’est pas fini. Tonton m’a dit que vous feriez un tour pour me donner plus de temps, mais il devait avoir peur que je fasse une énorme bêtise, alors je parie que la balade n’a pas duré longtemps.
-Ca explique certaines choses, murmura Denise en donnant un timide coup de coude à son époux.
-Mes instincts se souvent révélés vrais, non?
-Souvent, murmura Denise.
-Bon alors, tu me la montre cette surprise? Reprit Jeremy.
-Suis-moi, lança la jeune fille en l’attirant vers sa chambre.
Denise et Frank les suivirent de près et se tinrent derrière eux.
-Tu vas halluciner, ajouta Abby en ouvrant la porte de la pièce, j’ai pas fini de ranger, je précise, faut imaginer sans tout ce qui traîne partout.
Elle ouvrit la porte.
-Alors?
Denise se pinça les lèvres, ne sachant si elle devait rire ou pleurer, les yeux de Frank devinrent encore plus grands qu’à l’habitude et Jeremy ouvrit la bouche avant de rire.
-Trop bon, soupira-t-il en faisant un pas à l’intérieur, c’est extra. T’es géniale, j’adore.
Abby sourit encore plus largement et se tourna vers son oncle et sa tante. Dès lors, une grimace barra son visage.
-Ca vous plait pas? Demanda-t-elle timidement.
-C’est….original, murmura Denise.
-Original? Soupira Frank.
-Tu as un autre mot qui te viens en tête? Dit-elle sur le même ton en faisant une grimace.
-Je savais que ca ne vous plairait pas.
-Et tu l’as quand même fait, ajouta Frank.
-Oui, j’ai un argument imparable.
-On t’écoute? Demanda Denise en fronçant les sourcils.
-On va bientôt déménager, répondit-elle en souriant largement.
-Tu sais que tu manque un peu de logique, rit Jeremy, tu t’es donné du mal pour rien.
-Y a rien de plus simple que de passer un ou deux coups de rouleaux et de faire des éclaboussures de peintures sur un mur, se justifia la jeune fille, ça m’a amusé. Je le referais dans ma chambre quand j’en aurai une à moi. J’ai bien tenté à la maison, une fois.
-Ok, tu es bonne pour refaire la même chose dans ma future chambre à moi aussi.
-Ne lui donne pas cette idée, dit Frank en lui lançant un regard noir.
-Ben quoi, soupira Jeremy, c’est sympa je trouve. Ca donne du cachet à l’édifice, dit-il en riant.
Denise passa tendrement la main dans le dos de son époux qui soupira profondément.
-Il suffira de repasser un coup de rouleau avant de partir, murmura-t-elle à Frank avant de déposer un baiser sur sa joue, eh puis, c’est pas si mal tout compte fait.
-« Toi aussi mon fils ? », répondit Frank en la regardant.
Denise rit aux éclats avant de l’embrasser et de lui prendre la main.
-Rangez-moi cette chambre tous les deux, dit-elle avec autorité, et prends une douche Abby tu es pleine de peinture.
-Vous nous aidez pas? Demanda celle-ci.
-Non, ton oncle et moi avons d’autres projets, dit-elle en souriant
-On veut pas savoir, répondirent Abby et Jeremy à l’unisson.
La jeune femme rit et entraîna son mari dans le salon où ils se laissèrent tomber sur le canapé. Ils y restèrent de longues minutes enlacés à parler de déménagement, d’adolescents, de l’avenir de Jeremy et d’Abby. Ils entendirent les rires dans la pièce voisine présentant cela comme un avenir d’entente cordiale entre les deux adolescents.


Denise avait parlé avec son amie Claudia Joy de leur besoin de changer de maison. Suite à la demande qu’ils avaient fait pour avoir la garde d’Abby, ils avaient eu l’autorisation de visiter plusieurs autres maisons sur la base. Aujourd’hui Denise et Frank avaient rendez-vous pour trouver leur nouveau logement. Il y en avait quatre de vacants, il ne restait plus qu’à trouver celui qui leur conviendrait. Abby avait voulu venir avec eux, mais son oncle et sa tante avaient préféré que ce ne soit pas le cas, car elle les aurait sans doute plus gêné que conseillé comme il se devait.
Ils en avaient visités trois, toutes intéressantes, mais aucune au goût des deux en même temps. Ils perdaient espoir de trouver celle qu’il fallait, lorsqu’ils visitèrent la dernière maison. Elle se trouvait sur deux étages, en bois, avec des colonnes et un porche qui faisait toute la longueur du bâtiment. Bien que nettement plus petite que celle de la famille Holden, elle lui ressemblait beaucoup. A l’intérieur se trouvait une grande pièce, elle formait une cuisine et une salle à manger d’un seul tenant. Un petit salon se trouvait en face de cette pièce, séparés par un couloir où se trouvait un escalier qui montait à l’étage. En haut, trois chambres et deux salles de bains, dont une communiquant avec l’une des chambres. Denise et Frank trouvèrent la maison à leur goût et le garage était assez grand pour les voitures et les deux motos qu‘ils venaient d‘acheter. Le jardin était légèrement plus grand que celui qu’ils avaient à leur autre maison et une terrasse en bois surplombait la pelouse.
Ils se décidèrent pour prendre cette maison, mais ils voulaient en parler à Abby et Jeremy avant, et surtout vérifier si tout était en ordre. De retour chez eux, ils y trouvèrent Abby et Jeremy se chamaillant avec rage. Leur entente cordiale n’avait durée que quelques jours et l’espace était plus que restreint pour deux personnes aux caractères aussi forts que celui d’Abby et Jeremy. La jeune fille dormait dans la chambre de son cousin et celui-ci occupait le canapé chaque soir. Il avait protesté afin de regagner sa chambre, mais ses parents en avaient décidés autrement. En attendant le déménagement, Abby avait besoin de plus d’intimité que leur fils et celui-ci devait se plier à leurs règles, et il n’en avait plus l’habitude depuis longtemps. Il fallut quelques minutes pour qu’ils se calment tous les deux lorsque Denise et Frank étaient déjà rentrés. Ils leurs annoncèrent qu’ils avaient trouvé une maison et qu’ils voudraient la leur faire visiter le plus tôt possible. En attendant, tout le monde devait faire des efforts.
La tension s’atténua quelque peu et ils passèrent une soirée plus calme, même si, pour marquer son mécontentement suite à la réaction de Jeremy à son égard, Abby dormie dans la baignoire, ne voulant plus occuper sa chambre.
Denise et Frank avaient préféré ne pas s’en mêler outre-mesure et ne pas contester la décision de la jeune fille de passer une mauvaise nuit, jugeant que dès le lendemain, elle se montrerait plus raisonnable.
Quelques jours plus tard, ils avaient visités la nouvelle maison qui avait tant plu à Denise et Frank. Abby et Jeremy furent du même avis. Ils se chargèrent ainsi de mettre en ordre les papiers pour y emménager au plus vite afin que l‘avocat et l‘assistante sociale en charge du dossier, pourraient faire une visite.
Une fois tout en main, et le cœur plus léger, ils se mirent au travail.
Après les heures de travail Denise et Abby se chargèrent de faire quelques magasins de meubles et de bricolage pour faire de cette nouvelle maison la leur. Ils repeignèrent toutes les pièces. Les peintures étaient encore fraîches et la jeune fille avait eu le plaisir de réitérer sa décoration dans la première chambre de Jeremy, malgré les quelques réticences de Frank. Denise avait su le convaincre une fois de plus que la situation n’était pas aussi grave qu’il le pensait et qu’il pourrait laisser Abby et Jeremy le choix de leurs futures décorations. Ainsi, Abby en fit une presque similaire dans la pièce qui serait la sienne. Denise se chargea du reste de la maison avec l’aide de ses amies. Quant à Frank et Jeremy, ils se changèrent de monter les meubles. Le jour du déménagement arriva. Tout avait été parfaitement bien organisé et en à peine une seule journée, presque tout avait été mis en place, il ne restait plus que les cartons à défaire. Ils commandèrent des pizzas qu’ils mangèrent autour de la table déjà à sa place dans la salle à manger. La tension qui avait quelque peut opposée Abby et Jeremy en début de semaine avait disparue comme neige au soleil. Et les rires résonnaient dans toutes la maison. Ils restèrent longtemps tous les quatre ce soir là, puis, ils regagnèrent enfin leurs chambres respectives pour une bonne nuit de sommeil bien méritée après une telle journée.
L’assistante sociale arriva à l’improviste trois jours plus tard, en fin de journée. Elle fut surprise de voir toutes les mesures mises en œuvre pour que la famille puisse accueillir la jeune fille. Celle-ci s’entretint avec elle quelques minutes en tête à tête et lui avoua tout ce qu’il s’était passé depuis des mois. La manière dont ses parents s’étaient comportés avec elle, sa grossesse non souhaitée, sa fausse couche, le fait qu’elle en avait parlé à personne avant de l’avoir fait avec son oncle lorsqu’elle avait tenté de fuir et qu’il l’avait retenue. Abby lui raconta tout, sa vie dans sa presque totalité, car elle voulait mettre toutes les chances de leur côté et aussi mais surtout, car elle voulait plus que tout rester vivre avec son oncle, sa tante et son cousin. Après s’être entretenue avec elle, l’assistante sociale en fit de même avec Denise et Frank et même Jeremy. Elle les écouta tous avec intérêt, sans jamais ne rien lâcher de ses constatations. Elle ausculta tout dans les moindres détails, et elle repartit une bonne heure plus tard, sans avoir laissé aucun indice quant à sa décision finale. Abby rejoignit sa nouvelle chambre et se laissa tomber sur le lit. Elle entendit plusieurs fois Denise l’appeler au rez-de-chaussée mais elle ne bougea pas pour autant. La porte s’ouvrit doucement et la jeune femme entra. Elle s’assit à côté du corps de sa nièce et caressa tendrement ses cheveux.
-C’est foutu, grommela Abby sans se retourner.
-Encore une fois? Si c’était foutu à chaque fois que tu le pense, nous ne serions pas là aujourd’hui.
-Je sais tata, répondit la jeune fille en la regardant enfin, mais cette vieille sorcière ne semble pas sympa du tout.
-Ne te fie pas aux apparences, il y a sans doute plusieurs choses positives pour nous. Elle fera peut être un bon rapport, nous ne pouvons pas le savoir.
-C’est toi qui lui a dit ça? Lança-t-elle à l’homme qui se tenait dans l’embrassure de la porte, les bras croisés sur son torse.
-Oui, parce que je ne connais peut être pas grand-chose à tout ça, mais je sais ce que c’est d’être un observateur extérieur, ajouta Frank en entrant.
-Tu sais ce que c’est d’être sadique , c’est ça?
-C’est ça, répondit Frank en riant, ne t’en fais pas, rien n’est joué. Il te faut encore rédiger ta lettre et travailler sur le dossier avec l’avocat. Ensuite, il y aura l’audience.
-Ca se finira quand? Soupira Abby.
-Ca vient seulement de commencer, répondit Denise en souriant timidement.
-Plus vite tu te mettras au travail, reprit Frank, et plus vite les choses changeront et ça prouvera que tu en as vraiment envie.
-Oui, je comprends.
-Mais pas ce soir, lança Jeremy qui entrait à son tour, ce soir on se fait un film, alors vous feriez bien de venir tous les trois histoire qu’on puisse manger quelque chose avant, non?
-Oui, allons-y, ajouta Denise en se levant.
Abby acquiesça et se leva à son tour. Elle fit la moue et Frank passa ses bras autour de ses épaules pour l’entraîner avec lui.
-Quoiqu’il arrive, murmura-t-il à son oreille, n’oublie pas que tu es comme ma fille, princesse des roses.
-Je sais, mais ce sera pas pareil si je dois rentrer à Pittsburg.
-Au pire, on te kidnappe, lança Jeremy en riant alors que sa mère lui lança un regard noir, ok je n’ai rien dit.
Ils quittèrent tous les trois la pièce et rejoignirent la cuisine. Ils mangèrent tranquillement le repas préparé par Denise, même s’ils avaient tous le ventre noué en se remémorant le début de soirée et la visite de la femme qui allait sans doute faire toute la différence. Quelques minutes plus tard, ils prirent la voiture et allèrent en ville. Ils rentrèrent dans le cinéma et n’en sortirent que deux heures plus tard, parlant et débâtant du film qu’ils avaient vus. Puis, ils rentrèrent enfin chez eux.

Deux mois plus tard.

La jeune fille se trouvait dans sa chambre. Elle avait déjà pris ses marques dans la nouvelle maison. Bientôt elle devrait faire sa rentrée dans sa nouvelle école, si elle restait habiter à Charleston. Aujourd’hui, ils avaient rendez-vous au tribunal avec leur avocat, le juge mais aussi les parents de l’adolescente qui étaient venus en ville pour l’audience. Ils les avaient brièvement vus la veille, lors d’un dîner au restaurant, mais ils n’avaient pas eu davantage de contacts. Abby n’en avait pas voulu et ni son oncle, ni sa tante ne lui avait demandé de changer d’attitude, car aujourd’hui elle vivait chez eux et ne se trouvait plus à Pittsburg. La tension était plus que palpable entre les deux familles qui savaient que les prochaines heures seraient les plus décisives. Frank parlait peu, Jeremy s’efforçait de ne pas être dans les parages et de se concentrer sur son dossier d’admission pour le collège quelques jours plus tard. Denise essayait de penser à autre chose, s’occupant de sa maison et de sa famille, sans oublier d’aller voir ses amies lorsqu’elle ne travaillait pas. Elle était littéralement épuisée lorsqu’elle se couchait, mais cela évitait qu’elle ne passe de longues minutes à ruminer. En ce qui concernait Abby, elle était anxieuse et maladroite.
Ce jour là n’échappa pas à la règle, mais Denise ne lui en avait pas voulu.
Debout devant son miroir, Abby regardait son reflet. Elle avait admis qu’elle avait bien changée depuis son arrivée à Charleston. Elle portait une robe cintrée, grise, sans aucune fanfreluche et des ballerines de la même couleur. Elle avait les cheveux lâchés, sa frange engloutissant une partie de son visage. A peine un peu de rose sur les paupières, un fin trait noir sous les yeux et du gloss brillant sur les lèvres. Elle avait retiré toutes les boucles d’oreilles qu’elle avait, pour n’en garder que deux, de petites gouttes de nacre que lui avait offert Denise trois ans plus tôt, par courrier postal , se balançaient à ses oreilles. Elle les avait récupérées en rentrant à Pittsburg et les avait aussitôt mises.
La jeune fille leva les yeux vers la porte et y vit s’y tenir discrètement sa tante. Elle lui sourit tendrement et entra.
-Ca va? Demanda-t-elle timidement.
-Je crois, répondit la jeune fille sur le même ton en regardant ses mains.
Denise entra un peu plus et se dirigea vers le lit, elle s’y assit et fit signe à sa nièce de venir la rejoindre.
-Viens t’asseoir à côté de moi, s’il te plaît.
Abby acquiesça et la rejoignit en silence. Elle s’assit à côté d’elle et regarda le sol.
-Je peux te poser une question avant que tu ne commence? Se risqua la jeune fille.
-Bien sûr, je t’écoute.
-Tu trouves que j’ai vraiment changé? Demanda Abby en la regardant. Du genre, que tonton m’a rendue comme il voulait que je sois?
-Oui, tu as beaucoup changé, en quelque sorte. Il n’a pas voulu te faire devenir différente, il voulait que tu redeviennes celle que tu es vraiment.
-Habillée comme ça par exemple?
-Tu as toujours été celle que tu es aujourd’hui, tes vêtements n‘ont rien à voir là-dedans. Même si je dois avouer je préfère nettement la manière dont tu t’habilles maintenant plutôt que ce que tu portais en arrivant ici.
-Un peu trop trash? Dit-elle en souriant largement.
-Je sais que c’était une manière pour toi de te faire remarquer.
-J’aimais bien mes fringues quand même.
-Tu peux toujours en porter, certains, ajouta Denise.
-Tonton ne risque pas de faire une crise de nerfs? Il m’imagine toujours comme si j’avais six ans.
-Je te le répète, il t’aime comme tu es. Pourquoi à ton avis, ton oncle t’as toujours appelé princesse des roses?
-Je suppose que c’est juste un truc qui lui plaisait comme ça, grommela Abby.
-Pas vraiment.
-C’est quoi alors?
-Ca rejoint justement ce que je voulais te dire. Je veux que tu saches qu’on t’aime comme notre propre fille Abby. Je sais qu’on te l’a déjà dit plus d’une fois, mais c’est vraiment important, je veux que tu le saches. Tu compte beaucoup pour nous, quoiqu’il advienne aujourd’hui, tu auras toujours ta place dans cette maison et surtout dans notre vie, d’accord?
-C’est sympa, répondit Abby en souriant, merci.
-Je t’en prie, répondit Denise de la même manière, allez viens, il est temps d’y aller.
-Tonton tourne en rond en bas?
-C’est lui qui m’a gentiment demandé de venir voir ce que tu fais, il est bien trop anxieux pour le faire lui-même.
-Ca lui tient vraiment à cœur alors.
-Oooh oui, soupira Denise, tu peux me croire.
-Heureusement que tu es là, répondit Abby.
-Ton oncle est du même avis, même s’il ne l’avoue pas.
-Pas devant les autres, je suis sûre qu’autrement il doit bien te le dire, non? Lança l’adolescente avec un clin d’œil.
-Fin de la conversation, répondit Denise en se levant, allez on y va.
Elle lui prit la main et l’entraîna dans son élan. Elles descendirent les escaliers et retrouvèrent Frank dans le salon, faisant le cents pas et Jeremy assit à la table de la salle à manger, lisant le livret de l’école qu’il allait intégrer prochainement.
-Vous êtes prêtes? Demanda Frank alors que les deux jeunes femmes arrivèrent à sa hauteur toujours main dans la main.
-Oui, acquiesça Abby, on va essayer.
-Dans ce cas, en route, je ne voudrais pas…
-…être en retard, finirent les trois autres personnes avec lui.
Ils prirent leurs affaires et montèrent en voiture tous les quatre. Frank conduisit jusqu’au tribunal au centre de la ville, là où avait lieu l’audience visant à statuer sur le sort d’Abby.


Ils montèrent tous les quatre en silence le grand escalier en pierre menant au bâtiment imposant. La tension était plus que palpable lorsqu’ils virent les parents de la jeune fille les attendre en haut de l’escalier. Abby s’arrêta un instant en sentant une boule se former dans son estomac.
-Si on partait maintenant, murmura-t-elle.
-Hors de question, répondit Denise sur le même ton, tu es courageuse, alors fais preuve de courage.
-Ben aujourd’hui je me sens pas l’âme d’un héros, tu vois?
-Tout ira bien, répondit sa tante en lui prenant la main.
Abby ne répondit pas et elles avancèrent toutes les deux en silence. Une fois en haut de l’escalier, ils saluèrent les personnes déjà présentes et entèrent dans le bâtiment. Ils s’assirent sur des bancs en bois, les uns en face des autres avant qu’une femme ne les appelle. Ils n’avaient pas eu le droit de communiquer entre eux. Ils s’étaient contentés de se regarder en silence alors que leurs avocats respectifs les avaient rejoins.
Ils prirent place face au fauteuil du juge. La salle était vide. Il y avait trois sièges de chaque côté de l’allée. D’un côté, s’assirent les parents d’Abby et leur avocat, et de l’autre celui de la famille Sherwood, Frank et la jeune fille. Jeremy et Denise s’assirent juste derrière eux, à peine à quelques centimètres derrière la barrière en bois. Le juge entra et ils se levèrent un court instant avant de reprendre place à sa suite. Le vieil homme regarda avec attention le dossier qu’il avait sous les yeux. Le premier avocat commença sa tirade, et le juge demeurait silencieux, regardant par-dessus ses lunettes la jeune fille qui se trouvait assise en face de lui. Abby n’osait pas bouger d’un pouce, de peur de faire une maladresse qui lui vaudrait le retour immédiat chez ses parents. Ceux-ci exposèrent leurs raisons de vouloir garder la jeune fille auprès d’eux, puis, se fut au tour de son oncle de le faire, et enfin, le tour arriva pour Abby de prendre la parole. Elle se leva doucement sans quitter des yeux le regard sombre de l’homme qui allait devoir prendre la décision. Denise la vit trembler un instant et elle n’hésita pas une seconde de plus avant de glisser sa main au dessus de la balustrade et de lui prendre tendrement la sienne. Abby tourna le visage vers elle et sa tante lui sourit timidement.
-Ca va aller, murmura-t-elle.
Abby acquiesça et son regard se posa sur son oncle qui ne la quittait pas des yeux et qui se trouvait assis juste à côté d’elle.
-Il te suffit de dire ce que tu as sur le cœur, dit-il à son tour.
-Je ne veux pas vous perdre.
-Ca n’arrivera pas, répondit Frank en caressant tendrement la main qui tenait toujours celle de Denise.
Abby sourit timidement et se tourna vers le juge à nouveau.
-Vous êtes prête mademoiselle Lewis? Demanda celui-ci de sa voix grave.
-Oui votre honneur, répondit-elle en brisant tout contact avec son oncle et sa tante.
Elle prit une profonde inspiration et parla aussi clairement et distinctement que possible. Lorsqu’elle eu fini de réciter le texte qu’elle avait appris presque par cœur, elle attendit un long moment en silence alors que le juge relisait ses notes. Il leva les yeux vers elle et s’appuya sur ses coudes.
-Je vois que vous avez fait beaucoup de bêtises par le passé, Abby.
-Oui, monsieur. Mais c’est terminé maintenant.
-Comment pouvez-vous me le garantir?
-Je vis sur une base militaire, mon oncle est le type le plus strict que je connaisse, même s’il est super sympa en fait, se rattrapa l’adolescente, je vous assure qu’il est difficile de faire des bêtises avec lui dans les parages.
-Pourtant, il semblerait que vous avez trouvé le moyen d’en faire quelques unes.
-Oui, admit la jeune fille, mais je venais d’arriver et je ne connaissais rien à tous ces trucs. Si mon oncle et ma tante ne s’étaient pas bien occupés de moi, je ne serais sans doute pas là aujourd’hui.
-Seriez-vous rentrée chez vos parents?
-Non, répondit catégoriquement la jeune fille, je ne sais pas où je serais.
-Il est noté que vous avez tentée de faire une fugue?
-A quel moment?
-Il y en a eu plusieurs?
-Euuh, oui.
-Votre honneur, coupa l’avocat des Sherwood en se levant, qu’il soit noté qu’Abby a fugué de la maison de ses parents pour justement rejoindre son oncle et sa tante.
-Je ne parlais pas de cela, mais plutôt du jour où votre oncle vous a retrouvé sur une route quittant la ville. Pouvez-vous me donner une raison à cette fugue?
-C’est marqué dans le dossier? Murmura Abby.
-Oui, cela a été évoqué par l’assistante sociale venue au domicile de monsieur et madame Sherwood.
-Ah.
-Alors? Insista le vieil homme.
-Je suis obligée d’en parler là?
-Si je vous le demande, oui, vous y êtes obligée.
Abby fit une grimace et reprit la parole.
-J’ai fugué parce que je n’avais pas envie de rester avec eux à ce moment là. Je croyais qu’ils étaient comme mes parents et qu’ils s’en contrefichaient royalement de moi. Ils me voyaient comme une adolescente mal élevée, et intenable. Je n’étais qu’un poids pour eux de toute manière, alors il valait mieux que je partes.
-Pourquoi avoir changé d’avis dans ce cas?
-Mon oncle m’a retrouvé et il m’a dit que je me faisais des idées. Il ne comprenait pas pourquoi j’étais devenue comme ça. Alors…
Abby fit une longue pause, elle ne voulait pas révéler comme ça, à tout le monde ce qu’elle avait dit à son oncle et sa tante ce jour là. Elle s’était jurée de ne jamais avouer sa grossesse et sa fausse couche à ses parents. Elle aurait voulut trouver un mensonge assez important pour que le juge la croit, mais elle savait aussi que ni Frank; ni Denise qui savaient la vérité, ne le toléreraient.
-J’aimerai connaître la fin de votre phrase Abby, reprit le juge toujours avec calme.
-J’ai dis à mon oncle pourquoi j’étais venue. Je lui ai dit que mes parents ne voyaient jamais rien, parce qu’ils…ils n’avaient même jamais remarqué que…j’étais tombée enceinte, dit-elle à peine plus fort qu’un murmure en regardant le sol.
La mère de la jeune femme se leva d’un bond.
-Abby, ne mens pas de cette manière, ce n’est pas un jeu.
-Je ne mens pas maman.
-Tu vas me faire croire que tu étais enceinte et que je n’ai rien vu?
-C’est vrai.
-Et où est cet enfant, disparu comme par magie?
-Je l’ai perdu.
-Ben voyons, votre honneur, n’écoutez pas cette jeune fille, elle ne cesse de vous mentir. Elle veut simplement nous faire perdre patience et vous faire perdre du temps. Abby veut se faire remarquer, rien de plus. Elle doit rentrer avec nous, c’est notre fille et personne ne peut s’en occuper mieux que nous.
-S’il vous plait, reprit le juge, calmez-vous madame Lewis. Je vous ai entendu tout à l’heure. Monsieur Sherwood, connaissiez-vous l’histoire de votre nièce?
-Oui, répondit celui-ci en se levant, Abby m’a brièvement dit ce qu’il s’était passé.
-Brièvement?
-Je ne voulais pas la brusquer ou la forcer à me parler à moi si elle ne le souhaitait pas. Je lui ai conseillé de le faire avec mon épouse, la jugeant plus à même de venir en aide à Abby.
-L’a-t-elle fait madame Sherwood?
-Oui, répondit Denise en se levant, Abby avait besoin de parler avant tout, pour aller mieux.
-Mmhh, très bien grommela le vieil homme, vous pouvez vous rasseoir. Une dernière question Abby. Pourquoi croyiez-vous pouvoir vivre chez votre oncle et votre tante, plutôt que chez vos parents?
-Parce qu’ils m’aiment.
-Vos parents aussi, sinon ils ne seraient pas là aujourd’hui.
-Ils ne me le montrent pas, répondit simplement la jeune fille, j’ai l’impression d’être invisible avec eux. Ils me laissent faire tout ce que je veux, mais je m’enfiche, je préfère qu’ils viennent avec moi manger une glace, faire un tour en moto, aller à la pêche, ou me faire la remarque que ma jupe est un peu trop courte. Ca prouverait au moins qu’ils ont envie de passer du temps avec moi et qu’ils me regardent de temps en temps. Ici, je n’ai pas le droit de sortir le soir, mais dès que je suis un peu contrariée, ma tante le voit tout de suite, on va faire les boutiques ensemble, ou elle m‘apprends deux ou trois trucs en cuisine. Je n’ai pas beaucoup d’amis non plus, mais mon cousin me prête ses jeux vidéos, enfin pas tous, mais il fait ce qu’il peut pour que je ne m’ennuis pas. Et mon oncle, il m’apprend à me battre et à faire de la moto, même si je lui en ai abimé une. Il n’est pas tellement rancunier. Et puis, je ne suis pas seule le soir.
-Très bien, acquiesça le juge, merci Abby.
Celle-ci acquiesça et se rassit alors que Frank lui prit aussitôt la main et déposa un baiser sur sa paume. Elle lui adressa un sourire qui n’échappa pas au juge qui se replongea aussitôt derrière ses feuilles. Ils attendirent quelques minutes, discutant timidement dans leurs coins. Le juge se racla la gorge et Frank et Abby se retournèrent vers lui aussitôt. Anny et James en firent de même et les avocats, cessèrent de tergiverser.
-J’ai bien pris en compte les deux parties. Mon choix a été difficile, je dois vous l’avouer. Monsieur et madame Lewis, vous me paraissez être des personnes très bien et l’amour que vous portez à votre fille ne fait aucun doute. Monsieur et madame Sherwood, vous vous êtes montrés très indulgents et disponibles pour cette adolescente que vous ne connaissez que très peu finalement. Sachez que j’ai toujours eu horreur de voir des familles se déchirer de cette manière. Je ne supporte pas de voir des enfants séparés de leurs parents qui sont obligés de demander le droit de pouvoir s’en occuper. Mais parfois, pour le bien de tous, la séparation s’avère être la meilleure des solutions. Abby, vous avez montré que vous éprouviez beaucoup d’amour pour votre oncle, votre tante et votre cousin avec qui vous souhaitez vivre, mais vous éprouvez aussi de la haine et de l’amertume envers les personnes qui vous ont élevés et ont pris soin de vous jusqu’à aujourd’hui. J’espère que la décision que j’ai prise, vous fera prendre conscience de vos erreurs à tous, et que surtout vous Abby, vous preniez du bon dans ce qu’il vous arrive. Apprenez à pardonner, c’est important. Ainsi, j’accorde la garde intégrale d’Abby Lewis, jusqu’à sa majorité, à son oncle et sa tante. Félicitations. Monsieur et madame Lewis, vous pourrez toujours demander un droit de visite si vous le souhaitez. L’audience est levée, dit-il avant de donner un coup de marteau.
Abby poussa un cri de joie et se jeta aussitôt dans les bras de son oncle qui riait de bonheur. Il la serra contre lui et quelques secondes plus tard, d’autres bras se joignirent aux siens. En relevant la tête, il vit Jeremy et Denise les tenir tous les deux.
-Tu es officiellement ma petite sœur, lança Jeremy à la jeune fille avant de la prendre dans ses bras à son tour.
-Je suis si contente, soupira Denise en enlaçant l’adolescente.
Celle-ci passait de bras en bras et pleurait doucement. Frank salua l’avocat qui s’éclipsa discrètement et reporta son attention sur sa famille à présent réunie. Il vit sa sœur se lover dans les bras de son beau frère et une pointe de culpabilité le transperça de part en part. Mais il savait qu’il avait fait le bon choix. Il n’avait pas voulut que cela arrive de cette manière, mais c’était mieux pour Abby, elle pourrait ainsi être heureuse maintenant, car il prendrait soin d’elle. Ils se séparèrent tous et se calmèrent progressivement. Puis, la jeune fille se tourna vers sa mère qui attendait toujours un peu plus loin.
-Je suis désolée maman.
-Ne recommence pas à mentir, dit-elle en sentant sa gorge se nouer, je ne savais pas pour le bébé.
-C’est pas grave.
Anny acquiesça et se tourna vers son époux avant de reprendre la parole.
-Nous devrions nous remettre en route, on travaille demain tous les deux.
-Vous ne voulez pas rester encore un peu? Demanda timidement la jeune fille.
-Non, fêtes la nouvelle avec ta famille, nous n’avons pas le temps de toute manière.
-Ok, soupira Abby.
Sa mère lui jeta un dernier regard avant de faire demi tour. Elle fit quelques pas avant que l’adolescente ne la rattrape. Elle lui prit tendrement le bras et la fit se retourner. Elles échangèrent un regard et Abby se blottit dans les bras de sa mère qui la serra contre elle un instant.
-Merci maman, soupira Abby.
-Je suis désolée, chérie, répondit-il au bords des larmes. Tu pourras venir nous voir plus tard si tu veux.
-Ouais, mais je téléphonerais avant.
-Il vaudrait mieux, en effet.
Elles se séparèrent et la mère déposa un baiser sur le front de sa fille avant de sortir sans se retourner. Le père de la jeune fille la prit dans ses bras et déposa un autre baiser sur sa joue.
-Fais attention à toi, et écoute bien Frank et Denise, d’accord?
-Je te le promets.
-Je t’aime ma puce, dit-il avant de sortir de la même manière que son épouse.
Abby resta au centre de l’allée sans bouger bien longtemps après avoir vu la porte se fermer derrière ses parents. Elle sentit alors des mains se poser sur ses épaules et elle croisa le regard bleu de son oncle. Toute la peine qu’elle avait ressentie se dissipa comme neige au soleil et elle sourit largement. Peut être arriverait-elle à pardonner en fin de compte. Mais pour l’instant, elle était heureuse de pouvoir vivre avec son oncle, sa tante et son cousin. Elle avait une famille, une vraie.


La rentrée scolaire avait eu lieu depuis quelques jours déjà. Abby refaisait l’année qu’elle avait commencée à Pittsburg et Jeremy intégrait le collège de Charleston. Il avait choisit d’apprendre l’architecture, choix qu’il avait fait avant de s’engager dans l’armée. Abby quant à elle se trouva une passion pour la photographie qu’elle exprimait facilement dans une ville aussi belle que Charleston. Frank et Denise l’encourageaient dans cette voie. Ils passaient leurs temps libres ensemble le plus souvent. Ce week-end là était un peu spécial. Abby avait son anniversaire et ils avaient envisagé ce jour de manière un peu particulière. Son oncle et sa tante voulaient l’emmener avec eux et Jeremy dans l’Ohio, à la petite maison proche du lac que le couple avait acheté de nombreuses années auparavant.
Ils avaient donc tout préparé durant la semaine afin de juste pouvoir monter en voiture le vendredi en fin d’après-midi pour arriver au plus vite à leur lieu de vacances. La route durait neuf heures et ils avaient tous hâte d’arriver à destination. C’est pourquoi ils partirent tôt et Denise prit le volant après son époux. Ils arrivèrent au milieu de la nuit, tous épuisés. Même Frank s’était endormi à côté de la jeune femme qui avait remarqué qu’elle était la seule éveillée. Ils arrivèrent enfin et se couchèrent aussitôt. Le lendemain matin, ils prirent leurs petits déjeunés sur la terrasse en bois de laquelle ils pouvaient voir le lac où Frank et Jeremy aimaient aller pêcher. Denise et Abby prirent la voiture pour se rendre à la petite ville et faire quelques courses alors que Frank et Jeremy se chargèrent de faire le tour de la maison et de remettre en ordre ce qui ne l’était plus depuis leur dernière visite. Ils allèrent ensuite vers le lac avec les cannes à pêche et tout le matériel nécessaire. Denise et Abby revinrent enfin et leur préparèrent des sandwichs qu’elles leur apportèrent. Ils passèrent l’après-midi tous les quatre au bord du lac, où Jeremy apprit à sa cousine comment pêcher. Ils rirent beaucoup. Ils avaient attrapé quelques poissons suffisant pour le repas du soir. Et alors qu’ils s’apprêtaient à quitter les bords de l’eau, les deux jeunes gens se chamaillèrent gentiment. Ils finirent par tomber du ponton en bois dans l’eau fraîche, sans pour autant cesser de rire à l’unisson. Frank et Denise les rejoignirent pour les aider à remonter, mais, bien trop surpris pour y échapper, ils furent tous les deux attirés dans l’eau à leurs tours. Les rires fusaient au même rythme que les éclaboussures. Ils s’amusèrent tous les quatre de longues minutes avant de sortir de l’eau pour se sécher. Une fois tous changés, Frank mis en route le barbecue et Denise prépara les poissons, alors qu’Abby se chargea de l’accompagnement et Jeremy de la table. Une fois tout prêt, ils se mirent à table et dînèrent tranquillement.
-Et maintenant le gâteau, lança Denise en sortant de la maison avec ce qu’elle avait acheté plus tôt dans la journée, je crois que le gâteau au chocolat est ton préféré.
-Tout juste tata, répondit Abby en souriant, il y a même une garniture et un glaçage. Tu es géniale.
-Je ne l’ai pas fait moi-même alors attends de voir s’il est bon pour dire ça.
-Il ne sera jamais aussi bon que les tiens, mais on ne va pas chipoter.
-Tu ne trouveras jamais rien d’aussi bon que la cuisine de Denise, répondit Frank en prenant son épouse par la taille.
-Arrêtez de me charrier.
-Ils ont raison, reprit Jeremy, t’es la meilleure cuisinière de tout le pays.
-On a toujours raison, répondit Abby en tendant la main vers son oncle qui la lui frappa avec la sienne.
-Je sens comme la création d’un clan tout d’un coup, lança Denise en fronçant les sourcils toujours proche du torse de Frank.
-Non, il faut savoir s’entourer de temps en temps, n’est-ce pas tonton?
-Tout à fait, acquiesça celui-ci.
-En parlant de ça, reprit la jeune femme, Abby as-tu parlé à ton oncle de ton invitation?
-Euh, non, grommela celle-ci.
-Une invitation? Pour quoi?
-Tu vas me dire non de toute manière, se justifia l’adolescente.
-Dis toujours, continua Frank.
-Tu connais le soldat David Edwards?
-Oui, c’est un bon soldat et un garçon poli.
-Ravie que tu dises ça, soupira Abby en souriant jusqu’aux oreilles, parce qu’il m’a invité à sortir. Ca ne te dérange pas alors?
-On en reparlera, murmura Frank d’un air plus sombre.
-Je savais que tu ne voudrais pas.
-Nous en reparlerons, répéta Frank, je préfère discuter avec lui avant de toute manière.
-Tu le vois presque tous les jours.
-On ne parle pas de toi, on travaille.
-Et là, vous parlerez de moi? Grimaça Abby.
-A ton avis?
-J’essayerai de le convaincre de ne pas vouloir lui faire faire des pompes Abby, ajouta Denise en regardant son époux.
-Bon eh bien, avant que vous n’échafaudiez un plan d’attaque, reprit Jeremy, on pourrait manger le gâteau?
-Et ouvrir les cadeaux, termina Abby en souriant largement.
-En parlant de ça, soupira Jeremy en sortant un paquet de son dos, voila pour toi petite sœur.
Abby sourit largement et ouvrit le paquet qu’il lui avait tendu, un paquet de plusieurs jeux vidéos qu’il était certain d’intéressé la jeune fille.
-Merci, j’adore, dit-elle avant de déposer un baiser sur sa joue.
Denise et Frank échangèrent un regard et sourirent tendrement.
-Tu t’en charge? Demanda la jeune femme.
-Je croyais que tu voulais le faire, répondit son époux.
-S’il vous plait, soupira Abby, c’est de la torture là.
-Et là encore, ils sont sympas, ça pourrait être pire, soupira Jeremy.
-Si c’est la cas, tu m’aide à les foutre à l’eau?
-Si on arrive à chopper papa, aucun souci, je suis partant, répondit le jeune homme en riant.
-Tu change vite de clan Abby, lança Frank.
-Faut savoir s’adapter, répondit celle-ci. Bon alors, vous me dites ce que c’est mon cadeau?
-On doit admettre que tu es transformée depuis que tu vis avec nous, commença Denise, et en bien. Tu travailles bien à l’école et tu n‘as pas de mauvaises fréquentations.
-Pour l’instant, coupa Frank et nous espérons que ça va continuer.
-Et nous savons tous les deux que tu aimes beaucoup faire de la moto. C’est pourquoi, nous allons t’offrir les cours de conduite.
-Et une moto? Lança la jeune fille avec enthousiasme.
-Ne vas pas trop vite, rit Frank.
-Peut être plus tard, ajouta Denise.
-C’est pas grave, soupira Abby, c’est déjà un super cadeau.
Elle se leva et se lova dans les bras de Denise avant d’en faire de même chez Frank. Elle déposa un baiser sur sa joue et s’assit sur ses genoux alors que Denise se tenait toujours contre son époux.
-Merci beaucoup, lança la jeune fille, c’est vraiment sympa de votre part.
-Ne te mets pas à pleurer, murmura Frank en essuyant sa joue.
-Désolée, grommela Abby en enfouissant son visage dans sa nuque alors qu’il caressait tendrement ses cheveux d’une main, c‘est juste le plus beau cadeau que vous pouviez me faire, en plus d‘avoir le droit d‘habiter avec vous.
Denise vint près d’elle et déposa un baiser sur sa tête.
-Allez, coupons le gâteau, ce serait dommage de ne pas en prendre un bout.
Abby essuya ses larmes et lui sourit tendrement alors que sa tante coupa le gâteau et le servit à tout le monde. Abby ne bougea pas des genoux de son oncle et Denise prit place à côté d’elle alors que Jeremy prit une photo de ses parents et de la jeune fille enlacés et souriant à l’objectif.
Ils ne se levèrent pas de table avant la nuit tombée. Puis, ils se couchèrent de longues minutes plus tard, tous épuisés, mais heureux.
Le week-end se termina comme il avait commencé, entre rires, joie et tendres moments. Ils rentrèrent à la base de Fort Marshall et reprirent leur vie quotidienne, se jurant qu’ils reviendraient plus souvent. En famille.
FIN


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