Julia R.
 
 


Abby

Fanfiction by Julia R.






Un car se gara presque devant l’entrée de la base. De nombreuses personnes en descendirent. Des hommes, des femmes, seuls, accompagnés, des adolescents, quelques enfants. Ils se dispersèrent rapidement. Mais une jeune femme, un lourd sac en toile sur le dos, ne bougea pas. Le car redémarra, la laissant seule sur le trottoir. Ses cheveux rouges et noirs, longs et emmêlés flottaient au vent. Ils caressaient ses épaules à peine vêtues de larges bretelles en cuir. Une quantité incroyable de colliers se trouvaient autour de son cou le cachant presque entièrement. Le top qui recouvrait à peine quelques parcelles de son corps laissait voir un tatouage en forme de serpent à proximité de son nombril. Elle soupira bruyamment avant de laisser tomber son sac négligemment au sol. Il s’échoua à ses pieds habillés de hautes bottes en cuir où de nombreuses sangles marquaient de leurs bruits tous ses pas. La jeune femme tira brièvement sur sa jupe afin qu’elle descende un peu plus que la moitié de ses cuisses. Elle fit une grimace et soupira bruyamment.

-J’aurais dû me fringuer autrement.

Elle se mit à genoux sur le sol et fouilla rapidement dans son sac. Elle en sortit une veste en jeans qu’elle passa rapidement, tout en essayant de camoufler avec plusieurs larges bracelets son autre tatouage à l’intérieur de son poignet. En vain. Elle remit tout son fourbie dans son sac et le tassa vivement pour que tout y entre. Puis, elle se releva et remit ses affaires sur son épaule. Elle avança doucement vers l’entrée de la base de Fort Marshall. Des voitures se pressaient pour y entrer. La jeune femme regarda le manège quelques minutes en silence, analysant une manière pour elle de rentrer dans la base sans avoir à subir de contrôle. Mais il semblait qu’il n’y en avait aucun. Alors, elle se lança. Elle referma sa veste d’un coup sec, comme pour se donner du courage et fonça tête baissée. Elle ne regarda ni à droite, ni à gauche et ne prêta aucune attention à l’homme qui semblait l’appeler. Elle accéléra le pas, toujours plus vite, jusqu’à courir. Mais hélas, cela ne suffit pas. Une main l’empoigna fermement et elle regarda enfin le soldat.

-Où allez vous comme ca? Vous n’êtes pas de la base?

-Euh, non, je rends une petite visite. C’est une surprise.

-Vous devez vous identifier mademoiselle, personne ne rentre sans autorisation.

-Vraiment? Mais je vous assure que ça doit être une surprise.

-Il n’y a pas de surprise dans l’armée. Suivez-moi, grommela le jeune homme d’une voix sèche.

Elle le fit à contre cœur. Personne ne la quitta des yeux jusqu’au moment où elle arriva à l’accueil.

-Cette jeune femme a tenté d’entrer sans autorisation, lança le soldat qui l’avait intercepté, c’est un visiteur.

-Qui venez-vous voir sur la base? Fit l’autre homme derrière le comptoir.

-C’est important? Rétorqua la jeune femme en souriant.

-Oui, cette personne doit venir vous chercher alors il serait bon de nous donner son nom.

-Ok, c’est le Lieutenant-colonel Sherwood, grommela-t-elle.

-Et votre nom?

-En quoi ca vous regarde?

-Vous semblez bien jeune et…

-Assez vieille pour pas répondre à ce genre de questions.

-Donnez-moi votre carte d’identité s’il vous plait, insista le Sergent.

La jeune femme fit une grimace et fourra sa main dans la poche arrière de sa jupe et lui tendit une carte qu’il regarda avec attention.

-Vous vous appelez Milly Branks et vous avez vingt trois ans.

-C’est écrit, lança celle-ci en souriant.

-Oui, oui ça l’est, sauf que c’est une fausse carte d’identité assez mal imitée.

-Ca suffit pour acheter de l’alcool et aller en boîte, murmura la jeune femme.

- Je ne suis pas un videur de boite de nuit, alors vous allez arrêter de vous payer ma tête et vous allez me dire votre vrai nom et votre âge. Et quelles sont les raisons de votre venue ici.

-Je dois vraiment voir le Lieutenant-colonel Sherwood. Je vous en prie, on s’en tape de mon vrai nom, dites lui que quelqu’un l’attends et que c’est très important.

-Je dois savoir pourquoi je vais déranger un officier.

-Ben, si vous m’aviez laissé passer, vous ne l’auriez pas dérangé au moins.

-Etes-vous de la famille?

-Il aime m’appeler «@princesse des roses@», vous croyez qu’il appelle beaucoup de monde comme ça?

-Ca ne répond pas à ma question.

-Ouais, je suis dans la famille.

-Votre vrai nom?

La jeune femme soupira longuement en fermant les yeux. Il n’allait pas la lâcher et ce n’était que le début. Peut être n’aurait-elle pas dû venir après tout. Mais elle n’avait pas vraiment eu d’autres choix, même si elle avait de nombreuses idées quant à l’endroit où elle pouvait se trouver à ce moment là. Elle prit donc son mal en patience et se plia «@aux règles d’interrogatoires@» , puis le soldat donna un coup de téléphone au Lieutenant-colonel Sherwood, espérant de toutes ses forces que cette histoire n’allait pas lui retomber dessus.

La jeune femme avait pris place dans un fauteuil en attendant, mâchant un chewing-gum et jouant avec ses cheveux. La musique qu’elle avait mise à un volume sonore élevé dans son I-Pod, s’entendait dans presque toute la pièce. Elle attendait avec anxiété quand soudain, elle se leva d’un bond. Elle éteignit la musique et se précipita vers l’accueil.

-S’il vous plait, les toilettes c’est où?

-Au fond du couloir, grommela l’homme sans lever les yeux.

-Vous gardez un œil sur mon matos, soldat?

Il ne prit même pas la peine de répondre et la jeune femme s’éclipsa rapidement. Elle revint quelques minutes plus tard, habillée d’un pantalon large, mais bien plus déchiré qu’elle ne l’avait pensé. Elle jeta un rapide coup d’œil dehors et vit aussitôt une silhouette familière, une démarche assurée qu’elle connaissait bien, une carrure singulière et protectrice qu’elle se souvenait aimer. Elle tendit le bras vers une pile de brochures et cracha rapidement son chewing-gum dans l’une d’elle avant de la remettre en place et de sourire largement, le plus naturellement du monde lorsque Frank franchit la porte. Il avança vers le bureau d’accueil après lui avoir accordé un regard. La jeune femme ne bougea pas, mais sourit de plus belle lorsque le Sergent derrière le bureau la pointa du doigt. Frank se retourna avant de se figer sur place.

-Abby? S’exclama-t-il en faisant un pas. Mais qu’est-ce que tu fais là?

-Salut, répondit celle-ci avant de s’approcher de lui.

-Tu…tu as…changé.

-Pas toi, répondit-elle aussitôt en riant avant de se blottir dans ses bras.

Frank ne réagit pas tout de suite, mais il referma ses bras autour d’elle pour une tendre étreinte. La jeune femme se recula et lui sourit.

-Où es ta mère?

-A Pittsburg, tu veux qu’elle soit où?

-Tu es venue comment? Reprit l’officier en fronçant les sourcils.

-Comment va Denise? Lança Abby avec entrain.

-Abbyyyyy, gronda Frank, réponds à ma question.

-On va pas se prendre la tête maintenant, d’accord? S’il te plait, ça fait trop longtemps qu’on s’est pas vu. On parlera de maman et de comment je suis venue ici, plus tard si tu veux.

Frank n’eu pas le temps de répondre que la jeune femme s’empara déjà de son sac et s’approcha à nouveau de l’homme de l’accueil.

-C’est bon? Je suis libre là ?

-Disparaissez, grommela celui-ci pour que elle seule l’entende.

-Tout est bon, on y va? Lança la jeune femme avec entrain avant de s’emparer du bras de Frank et de l’entraîner avec elle.

-Au revoir et bonne journée mon Colonel.

-Vous aussi Sergent, répondit Frank en lui accordant un bref regard.

Mais Abby retourna une dernière fois la tête vers le Sergent responsable de sa «@captivité@» et lui tira la langue avec toute la rage dont elle pouvait faire preuve.

@

Ils se trouvaient tous les trois à table, mangeant en silence. Le couple avait été très étonné en apprenant que Abby se trouvait à l@‘entrée de la base. Ils avaient supposés que ses parents et son jeune frère y étaient également. Mais non, elle était seule. Et Denise, tout comme Frank lorsqu’elle la vit sortir de la voiture, elle avait été très étonnée de la voir si changée. Cela faisait déjà trois ans qu’ils ne l’avaient plus revus, mais en trois ans, la grande enfant était devenue une toute jeune femme. Abby n’avait que dix huit ans, et se transformait de jour en jour, mais ils n’avaient pas été préparés à ce que la transformation se fasse aussi radicalement. Le repas s’était ainsi passé dans un calme inhabituel pour de telles retrouvailles. Denise n’avait su quoi dire en dehors des banalités d’usage que l’adolescente évitait avec une facilité déconcertante. Abby appréciait beaucoup Denise, depuis toujours, elle la respectait, car si tel n’avait pas été le cas, celle-ci le saurait sûrement. Alors, elle préféra ne pas trop en dire, laissant Frank gérer la situation à sa façon. Elle se mit à débarrasser et Abby se proposa de l’aider. Mais après le regard de connivence accordé à son époux, elle préféra le faire seule.

-Abby, il faut qu’on parle, lança Frank avec sérieux en appuyant ses coudes sur la table.

-Tu veux pas que j’aille aider Denise?

-Non, tu reste assise à table.

-Ok, soupira la jeune femme en jetant sa serviette sur la table.

-Déjà, pour commencer, tiens-toi bien, et enlève cette veste, tu dois avoir chaud.

-Non, ça va.

-Abby, enlève la, tu es toute rouge.

Elle fit une grimace et ouvrit la veste qu’elle retira doucement, espérant un miracle tombé du ciel qui pourrait empêcher la future réaction de Frank. Mais ce qu’elle avait prédit se passa.

-Depuis quand tu es pleine de tatouages? Lança le Colonel avec des yeux ronds.

-Je suis pas «@pleine@» et t’en a aussi.

-Ca me regarde, toi…

-Ca me regarde aussi, coupa la jeune femme.

-Moi je suis majeur, je n’ai de comptes à rendre à personne. Toi tu as des parents et je suis persuadé qu’ils ne sont pas d’accord avec ce que tu fais de ton corps.

-Ils en ont rien à faire de toute manière. Est-ce que maman t’a prévenue que je venais? Elle s’inquiète de pas me voir depuis plus d’une semaine?

-Tu as quitté la maison depuis une semaine? Gronda Frank.

La jeune femme ne répondit pas et regarda le sol. Elle entendit Denise entrer dans la pièce à nouveau. Elle ne vit pas que celle-ci jeta un tendre regard à son époux afin de l’apaiser. Frank comprit le message et respira profondément avant de reprendre la parole avec plus de calme.

-Je vais appeler ta mère pour qu’elle sache que tu es ici.

-S’il te plait, elle n’a pas besoin de savoir que je suis là, rétorqua Abby en levant brusquement la tête.

-Si elle a besoin de le savoir parce qu’elle va venir te chercher et tu vas rentrer avec elle.

-Je ne rentrerai pas avec elle.

-En quel honneur?

-Ben si j’avais su que tu étais aussi…

-Vas appeler Anny chéri, intervint Denise, elle doit savoir que tu es avec nous Abby. C’est ta mère et elle doit s‘inquiéter.

-Mais je suis mieux avec vous qu’avec elle. Je veux rester et vous ne pouvez pas m’obliger à rentrer, si elle vient ici, je pars dans la seconde, et autant vous dire que pour le coup, personne ne saura où je vais.

-Je n’aime pas les menaces Abby, répondit Frank en se levant enfin.

La jeune femme ne répondit pas et Frank quitta la pièce suivit de près par Denise.

-Je ne sais pas ce qu’il s’est passé avec ta sœur, mais je pense que se serait bon que tu lui en parle, et peut être que se serait bien pour Abby qu’elle reste avec nous le temps du week-end, murmura Denise.

-Tu entends ce que tu dis?

-Reconnais-tu la petite fille qui aimait tellement que tu la prennes dans les bras et qui écoutait toutes tes histoires avec admiration?

-Tu veux dire en dessous de l’épaisse couche de maquillage, des tatouages et des cheveux en bataille? Répondit Frank en se retenant de sourire.

Denise en fit de même avant d’acquiescer.

-Elle a bien changé Denise, cette adolescente dans notre salle à manger ne ressemble en rien à la petite fille que j’ai si bien connu.

-C’est peut être parce qu‘il y a une bonne raison.

Frank ne répondit pas immédiatement et jeta un bref regard vers la salle à manger où se trouvait toujours la jeune femme. Il sentit la main de son épouse se poser sur son bras.

-Appelle ta sœur, tu en auras le cœur net. Abby peut rester ici en attendant qu’elle vienne la chercher, tu sais qu’elle ne me dérange pas, loin de là.

-Je sais, seulement…

-Avoir ta sœur au téléphone est une vraie épreuve de force, lança Denise en riant, courage soldat, ajouta-t-elle avant de déposer un baiser sur ses lèvres et de le laisser seul.

Frank la regarda partir en soupirant avant de s’emparer du téléphone et de composer le numéro de sa sœur vivant à Pittsburg. A chaque nouvelle sonnerie, il se sentait de plus en plus mal à l’aise. Car il devait l’avouer et toute la famille le savait, Frank et Anny ne s’entendaient pas très bien depuis des années, depuis toujours. Comme frère et sœur. Comme chien et chat surtout. Le combiné fut décroché et une voix grave se fit entendre à l’autre bout du fil.

-Résidence Lewis.

-James, c’est Frank Sherwood, je...

-Tu veux parler à Anny? Je vais te la rechercher.

-Je vais très bien, merci, murmura Frank pour lui-même, et je veux bien que tu me passes ma sœur adorée.

Il attendit quelques secondes avant d’entendre une voix féminine au bout du fil.

-Frank? Salut.

-Salut Anny. Je peux te parler quelques minutes?

-Ecoute, tu tombes vraiment mal là.

-C’est très important.

-Moi aussi j’ai des choses importantes.

-Ne t’inquiète plus pour Abby elle est chez nous et…

-Abby? Mais qu’est-ce qu’elle fait chez vous?

-Justement, j’allais te poser la question. Il serait bon que tu viennes la chercher.

-Frank, je n’ai pas le temps de venir pour Abby. Je pensais qu’elle était chez une amie, nous ne l’avons plus vu depuis plusieurs jours déjà. Et ça n’a rien d’étonnant.

-Eh bien, depuis tout ce temps, elle a trouvé le moyen de venir jusqu’ici.

-Que veux-tu que je te dise?

-Que tu t’inquiétais pour elle, ce serait un bon début, tu ne crois pas? Fit plus fort le Colonel.

-Frank, c’est une grande fille et je n’ai vraiment pas le temps de m’occuper de tous ses malheurs. Le lycée ne l’intéresse plus de toute manière, elle avait sans doute envie de faire une petite pause, voilà tout. Je me pose tout de même la question, pourquoi elle est venue chez toi? C’est sans doute comparable à une prison pour elle.

-Je te remercie, grommela Frank en se laissant tomber dans le canapé.

-Je t’en prie, ose dire le contraire? Lança sa sœur en riant.

-Qu’envisage-tu de faire avec ta fille? Reprit le Colonel sans tenir compte de sa remarque.

-Si elle survie, elle n’a qu’à rester chez toi, je te l’ai dis, j’ai beaucoup de choses à régler avec le boulot et…

-Et tu n’as pas le temps avec ta fille, j’ai bien compris. Il est donc préférable qu’elle reste ici quelques temps en effet.

-Tu trouveras sans doute le moyen de la transformer en un bon petit soldat comme papa à fait avec nous. Je te souhaites bien du courage, car pour Abby, on ne peut hélas plus rien faire.

-Je ne la changerai en rien du tout, gronda Frank, mais je suis persuadé que c’est une jeune fille très bien.

Il entendit un éclat de rire à l’autre bout du fil qui le fit se sentir encore plus en colère. Puis, Anny reprit la parole.

-Elle n’est plus la petite princesse que tu faisais tournoyer dans les airs. Abby a grandit et elle est devenue indépendante.

-Je suis certain qu’elle est toujours la même.

-Tu ne l’as sans doute pas encore vu plus d’une journée. Je te souhaite bien du courage grand frère. Tu nous la renverras quand elle sera devenu insupportable. James et moi nous seront absents tout le week-end alors dis lui que la clé de la porte est sous le pot de fleur à droite du banc blanc.

-Tu plaisantes j’espère?

-Je dois y aller, on m’attends. Je suis sérieuse Frank, tu n’es pas fait pour t’occuper d’une adolescente comme Abby. Laisse la partir si elle le souhaite, au moins, elle ne te détestera pas. A bientôt.

-Anny tu…

Il ne pu finir sa phrase que déjà il entendit la tonalité du téléphone. Il raccrocha fou de rage face à l’indifférence d’une mère face à sa fille. Puis, il vit les deux autres personnes présentes dans la pièce.

-Elle a au moins passé le bonjour à Denise? Lança Abby avec sarcasme.

-Elle a dû le faire.

-Qu’a-t-elle dit? Demanda Denise.

-Qu’elle est pressée et qu’elle n’a pas le temps de bavarder, reprit Abby, mmmh je soupçonne un week-end en amoureux avec papa. La clé est sous le pot de fleur à coté du banc et Tim est chez madame Parkins, c’est ça?

-Elle n’a pas parlé de ton frère, répondit Frank en se levant.

-Bon alors? Il décolle quand mon avion? Grommela Abby en levant les yeux aux ciel.

-Pas aujourd’hui, tu vas rester quelques jours ici.

-Sérieux? Maman n’a pas crisée? Genre tu vas faire de moi un de tes soldats, ou une nonne. Elle dit toujours ça de toi.

-Je n’en doute pas.

-Et je reste quand même? Lança la jeune femme en souriant.

-Oui.

-Cool, t’es trop fort.

-Abby tu peux me laisser seul avec ta tante s’il te plait?

-Ouais, j’ai pas envie d’entendre ce que tu vas dire sur moi de toute manière, soupira la jeune femme en retournant à la salle à manger.

Denise s’approcha de son époux et il reprit la parole à peine plus fort qu’un murmure.

-Je ne sais pas ce qu’il se passe, mais une chose est certaine, Abby a besoin de nous. Ca ne te dérange pas qu’elle reste ici le temps que je trouve pourquoi cette gamine est devenue cette adolescente déboussolée et si…mal élevée?

-Ca ne me dérange pas Frank. Elle peut rester aussi longtemps qu’elle le veut.

-D’après Anny ça ne va pas durer longtemps.

-Nous verrons bien. J’ai appris à vivre au jour le jour depuis ce qui est arrivé à Jeremy.

-Je sais, soupira Frank en l’attirant vers lui, je sais, répéta-t-il avant de déposer un baiser dans ses cheveux, mais je crois qu’un nouveau défi de taille nous attends.

-J’ai confiance, murmura Denise dans les bras de son époux.

@

@

Trois jours plus tard.

Denise ramassait pour la énième fois un gilet bleu marine qui traînait dans le salon. Elle avait oublié ce que c’était de vivre avec un adolescent. Même si elle devait se l’avouer, Abby n’avait rien en commun avec Jeremy. La jeune femme soupira en ramassant un paquet de chewing-gum avant de jeter un œil à Abby qui se trouvait plus loin. L’adolescente lisait un article dans le dernier magazine de mode en vogue et écoutait de la musique qui devait sans doute lui briser les tympans, tant elle était forte. Denise s’avança vers elle et lui sortit un écouteur de l’oreille. Elle croisa son regard aussi bleu que celui de Frank et lui parla tendrement, avec toute la patience dont elle pouvait faire preuve.

-Abby, tu devrais aller te préparer, ton oncle ne va pas tarder à rentrer et il a horreur d’être en retard.

-Ouais, j’y vais, grommela la jeune femme en se levant.

Denise la regarda partir avec satisfaction. Elle pouvait encore avoir de l’autorité sur une jeune fille tout compte fait. Elle se remit au bref rangement qu’elle avait entreprit depuis un long moment déjà. Frank allait rentrer d’une minute à l’autre et ce soir là, une réception avait été organisée où ils se devaient d’assister. L’envie d’emmener avec eux Abby n’avait pas été flagrante, loin de là, ils auraient préférés l’éviter. Mais ils n’avaient eu guère le choix. Il leur semblait préférable de garder un œil sur elle.

Frank entra lorsque Denise venait à peine de terminer de tout rassembler sur le canapé.

-Hey, bonsoir, murmura le Colonel avant de l’embrasser.

-Salut soldat, répondit Denise sur ses lèvres.

-On peut y aller?

-Oui, Abby termine de se préparer.

-Abbyyyyy, lança Frank en s’éloignant de son épouse, dépêche toi, nous devrions déjà être partis.

-J’arrive, cria une voix dans une pièce voisine.

Il se passa quelques secondes avant que la porte de la salle de bains ne s’ouvre à la volée. La jeune femme avança dans le couloir en souriant largement alors que le couple la regarda avec de grands yeux ronds.

-C’est bon, on y va?

-Tu ne compte pas y aller comme ça? Grommela Frank en la regardant de la tête aux pieds.

-Ben quoi, Denise m’a dit de mettre une robe, c’est une robe, répondit la jeune femme en baissant les yeux vers ses chaussures, ouais, les pompes ça le fait pas.

-Non, pas vraiment.

-Je vais te chercher quelque chose qui devrait t’aller, intervint Denise, mais passe ce gilet sur tes épaules, ajouta-t-elle en lui tendant le gilet qu’elle avait ramassé un peu plus tôt.

-Pourquoi?

-Eh bien, hésita Denise, ton décolleté est un peu trop, ouvert, lança-t-elle avant de s’éclipser.

-Question de point de vue, tata, murmura Abby pour elle-même avant d’enfiler le gilet.

Quelques minutes plus tard, ils quittèrent la maison tous les trois. Abby avait beau essayé de s’habiller comme lui avait demandé son oncle et sa tante, cela n’y faisait rien, elle se sentait comme un épouvantail déguisé. Une fois arrivée sur le lieu de réception, la jeune femme remarqua à quel point elle n’était pas vêtue comme les autres. Même cette jeune fille un peu plus loin, qui devait avoir son âge, tout au plus, était élégante, alors qu’elle, semblait sortir d’un film d’horreur. Elle glissa ses doigts dans ses cheveux pour essayer de les discipliner un peu, mais hélas, cette cause était perdue d’avance.

-Denise, Frank, soupira une femme à l’entrée de l’immense bâtisse.

-Bonsoir Claudia Joy, répondit aussitôt Denise, voici Abby, notre nièce.

-Madame, grommela celle-ci.

-Je suis ravie de te rencontrer Abby, répondit Claudia Joy en souriant, je vous en prie, entrez.

-Tout est une fois encore organisé à la perfection, lança Frank.

-Merci, répondit Claudia Joy en souriant.

Abby suivit son oncle et sa tante à l’intérieur. Elle salua poliment toutes les personnes qu’elle rencontrait. Denise la présenta à ses amies avec qui elle resta un petit instant. Frank s’était rapidement éloigné pour saluer les autres officiers. Il ne se passa que quelques courtes minutes avant que Abby ne sente l’ennui l’envahir profondément. Denise la laissa seule elle aussi.

-Elle va mourir d’ennuis dans dix minutes, soupira-t-elle à sa meilleure amie.

-Ca n’a pas l’air d’être le genre de fête branchée qu’elle côtois habituellement, répondit Claudia Joy.

-Non, j’en doute.

-Elle va rester longtemps avec vous?

-Nous n’en avons que très peu parlé. Tu sais, Abby est sans doute une des personnes sur cette Terre que Frank aime le plus. Depuis qu’elle est née, il a toujours pris soin d’elle de loin, même s’il ne s’entend pas avec sa sœur. Il lui a toujours offert les plus beaux cadeaux, il lui a raconté les plus belles histoires, et, crois-le ou non, mais il a toujours adoré la prendre dans ses bras.

-Je n’imaginais pas Frank comme ça, répondit Claudia Joy.

-Oooh mais il n’est pas mon mari pour rien, répondit Denise sur le même ton en lui donnant un coup de coude. Il était très différent avec Jeremy, mais je crois qu’il aime Abby comme si elle était sa fille. Et c’est pour cette raison qu’il n’a pas voulu la renvoyer, soupira Denise en regardant la jeune femme plus loin.

-Et tu en penses quoi?

-Qu’il a fait le bon choix. J’aime beaucoup aussi cette gamine et quand tu vois la manière dont elle a changée, tu te poses une quantité de questions.

-L’adolescence, soupira Claudia Joy avant qu’elles ne rirent toutes les deux.

-Ca doit être ça, répondit Denise qui voulait encore éluder le sujet de la manière dont vivait Abby à Pittsburg.

Elles discutèrent encore quelques minutes, avant que Denise ne décide de rejoindre l’adolescente afin qu’elle ne s’ennuie plus. Mais elle ne la vit pas à la table où elle l’avait laissé. Elle interrogea ses amies et la chercha partout, mais Abby demeurait introuvable. Alors qu’elle voulut rejoindre Frank pour lui demander s’il ne l’avait pas vu, elle l’aperçu un peu plus loin. Abby échangeait quelques mots avec Emmalin, mais quelque chose faisait penser Denise que ce n’était pas des mots d’amitié. Elle vit le geste malheureux que fit sa nièce pour se dégager de la fille de son amie. Elle vit son bras passer à quelques millimètres de la haute pile de verres posés sur la table. Mais elle n’eu pas le temps de réagir. Abby vacilla et se rattrapa sur la table proche d’elle. Denise avança au pas de course, voulant à tout prix éviter la catastrophe, mais hélas, elle n’y parvint pas. La jeune femme tomba sur la table, emportant avec elle les dizaines de verres qui se brisèrent avec fracas sur le sol. Toute l’assemblée se tourna aussitôt vers elle. Denise parcourut le chemin en un quart de temps. Il y eu des éclats de voix sur son chemin, des soupirs de surprises et des regards interrogateurs. Denise se sentait terriblement mal à l’aise. Mais elle tenta de faire abstraction de tout cela pour venir aider sa nièce. Abby se releva avec difficulté et leva aussitôt les yeux vers sa tante.

-Euuuh, désolée, grommela-t-elle en prenant la main que lui tendait Denise.

-Lève-toi.

Elle s’exécuta et replaça sa robe correctement, se sentant mal à l’aise. Frank arriva avant qu’elle n’ait le temps de dire quoique se soit. Il avait abandonné Michael en pleine conversation pour se précipiter vers l’origine du fracas. Il sentait tous les regards des invités posés sur eux.

-Abby, mais qu’est-ce qu’il t’a pris?

-Ben, j’ai glissé je crois.

Il lui lança un regard noir avant de reprendre.

-Tu te rends compte de ce que tu viens de faire? Murmura-t-il.

-Ouais, j’ai taché ma robe, et…

-Tu viens de gâcher toute la soirée, et de nous mettre dans une situation impossible.

-Désolée, soupira Abby, j’ai pas fais exprès.

-Tu vas t’excuser auprès de madame Holden et nous allons rentrer dans la seconde.

Abby ne répondit pas et tenta de faire un pas en direction de Claudia Joy qui arrivait au même moment. Mais elle eu un violent vertige et se rattrapa au bras de Denise. Ce geste n’échappa pas à Frank qui s’approcha de son visage avant de s’en éloigner en devenant rouge de colère.

-Tu as bu de l’alcool?

-Un peu, c’était une petite bouteille.

Frank vira au rouge et la prit par le poignet.

-Excuse-nous Claudia Joy, dit-il en se tournant vers son amie, Abby, présente tes excuses à Madame Holden.

-Désolée madame.

-Comment pouvons-nous arranger tout ça? Demanda Denise.

-Je doute que se soit possible, murmura Claudia Joy en regardant le désastre.

Michael arriva lui aussi et aussitôt Frank reprit la parole.

-Je suis désolé pour cet incident. Abby viendra vous aider à tout nettoyer, dit-il en regardant sa nièce, mais je crois qu’il est temps pour nous de rentrer et de mettre au clair certaines choses.

-Oui, je crois aussi, répondit Claudia Joy.

Frank acquiesça et tira Abby sans ménagement. Denise quand à elle ramassa le sac de la jeune femme et en sortit une bouteille de Bourbon vide qu’elle tendit discrètement à son amie.

-Je suis vraiment désolée Claudia Joy, soupira-t-elle.

-Je t’en prie, je veux voir Abby demain matin, lorsqu’elle ne sera plus malade parce qu’avec ce qu’elle a bu…

-Oui, ne t’en fais pas elle sera là sans faute, Frank y veillera.

Claudia Joy lui adressa un timide sourire auquel elle répondit avant de sortir aussitôt à la suite de son époux et de sa nièce.

Ils ne montèrent pas en voiture tout de suite, car Abby se trouva malade et il était impossible pour elle de passer une minute sans vomir.

Frank soupira en fermant les yeux alors que Denise caressait tendrement le dos de la jeune femme.

-Ca va aller? Demanda-t-elle doucement.

-Naaaaan, grommela la jeune femme en plaçant ses cheveux derrière ses oreilles, je suis malade.

-Il fallait peut être que tu y penses avant de boire tellement, répondit Frank; mais qu’est-ce qu’il t’a pris?

-Je m’ennuyais, la prochaine fois vous avez qu’à me laisser à la maison.

-Parce que tu crois qu’il y aura une prochaine fois? Gronda Frank.

-Frank, murmura Denise en lui lançant un regard.

-Tu veux revivre ce qu’il s’est passé ce soir?

-Non, mais ce n’est peut être pas le moment d’en parler.

Elle fut interrompue par Abby se baissant une fois encore vers le caniveau. Elle se releva et lança un timide regard à Frank qui ne la quittait pas des yeux.

-On rentre, murmura-t-il, et nous en reparlerons demain.

Abby ne répondit pas et Denise l’aida à monter en voiture. Elle lui donna un sac en papier, au cas où elle se sentirait mal pendant le trajet et s’assit à l’avant.

Le trajet se passa rapidement. Frank ne lâcha plus un seul mot jusqu’à la maison, alors que Denise s’occupait du mieux qu’elle pouvait de sa nièce. Elle l’aida à prendre une douche et la mise au lit.

-Merci tata, murmura Abby avant de tomber de sommeil, t‘es cool toi au moins.

-Je t’en prie, princesse des roses, répondit-elle en souriant avant de déposer un baiser sur sa tête et de quitter la chambre.

-Comment peux-tu agir ainsi avec elle? Lança Frank qui l’avait regardé depuis le couloir.

-Ca ne servirait à rien de lui faire la morale.

-Eh bien, crois-moi, elle ne va pas s’en sortir aussi facilement.

-Je le sais Frank, répondit Denise en entrant dans leur chambre avant qu’il n’en fasse de même, mais nous verrons ça demain, ajouta-t-elle avant de fermer la porte derrière eux.

@

Frank tambourinait à la porte depuis plusieurs minutes déjà, mais pourtant, ses coups ne faiblissaient pas en intensité. Il était encore tôt et le réveil qu’il réservait à Abby était des plus brutal, mais il y avait pensé un partie de la nuit, alors que Denise s’était déjà profondément endormie dans ses bras. Il s’était promis de venir en aide à la jeune femme, mais ce qu’elle avait fait le soir précédant lui donnait l’envie de tout envoyer balader pour la résonner à sa façon. Et ce dimanche matin était le premier jour du programme qu’il s’était fixé.

-Abbyyyyyy, gronda-t-il en continuant de frapper, lèves-toi tout de suite ou je viens te chercher avec un sceau d’eau glacée.

Denise cacha un timide sourire avant de boire une gorgée de café. Elle ne comptait pas s’en mêler cette fois-ci.

Frank donna encore deux coups avant que la porte ne s’ouvre sur une jeune femme encore endormie. Ses cheveux sombres et emmêlés avalaient son visage. Elle leva un court instant les yeux vers Frank avant de prendre la parole en un grognement.

-J’ai mal au crâne, tu peux pas faire plus doucement? J’ai entendu.

-Si tu as entendu, pourquoi tu ne t’es pas levée tout de suite? Rétorqua Frank.

-Je croyais que t’allais me foutre la paix.

-Tu as dix minutes pour prendre ta douche et t‘habiller, ensuite tu viendras manger quelque chose et nous partons aller réparer tes bêtises d’hier soir.

-On peut pas y aller plus tard là je suis naze.

-Non, dépêche toi.

Il la laissa et se dirigea vers la cuisine sans entendre le juron que grommela la jeune femme avant d’entrer dans la salle de bains pour y prendre sa douche. Elle y arriva tan bien que mal. Sa tête lui cognait toujours et elle ne demandait qu’à dormir encore et encore. Elle rejoignit les autres personnes dans la cuisine. Frank jeta un rapide coup d’œil à sa montre avant de boire une gorgée de café.

-Dans cinq minutes nous partons tous les deux, avale quelque chose.

-C’est dimanche, tu veux pas arrêter de regarder ta montre? Grommela la jeune femme en fronçant les sourcils.

-Non, parce que tu as un emploi du temps chargé. Dépêche toi ou tu pars sans rien avaler.

-Je suis au régime de toute manière.

-Très bien, lança Frank en se levant, on y va dans ce cas.

Abby soupira et laissa tomber sa tête sur la table. Elle resta dans cette position quelques minutes avant qu’elle ne sente une main lui tapoter l’épaule.

-Debout, je t’attends déjà.

-Ouais, soupira Abby en se redressant.

Elle prit le paquet de gâteaux sec que lui tendait Denise avant de se diriger vers l’entrée.

-Je ne sais pas quand on rentrera, murmura Frank avant d’enlacer Denise.

-Poulet rôti pour le déjeuné?

-Nous ne sommes pas jeudi, répondit Frank en fronçant les sourcils.

-Un peu d’imprévu et de piment dans notre vie, murmura Denise sur ses lèvres.

-Je crois qu’on en a eu assez, non?

-Justement, un poulet rôti un dimanche, qu’est-ce que cela va nous faire?

-Rien, soupira Frank, tu as raison.

Il l’embrassa tendrement avant de s’éloigner.

-Je t’aime, lança-t-il avant de quitter la pièce.

-Courage soldat, cria Denise en souriant avant que son époux ne referme la porte derrière lui.

Frank retrouva Abby assise dans la voiture, le regard sombre et son casque sur les oreilles. Il lui retira un écouteur pour lui parler.

-Moins fort la musique.

-Je vais devoir faire quoi encore après? Rétorqua la jeune femme.

-Mettre ta ceinture et arrêter de me répondre, répondit Frank avec calme.

Abby resta silencieuse et regarda le paysage défiler derrière la vitre. Frank ne prononça pas un seul mot avant d’arriver au bâtiment où avait eu lieu la réception le soir précédant. Elle sortit de la voiture en même temps que Frank. Celui-ci arriva à sa hauteur et lui tendit la main. La jeune femme la regarda avec de grands yeux avant qu’il ne prenne enfin la parole.

-Pas d’écouteurs.

-Tu plaisante? Tu vas pas me faire ça?

-Ais-je l’air de plaisanter Abby, répondit Frank, donne moi ton I-pod, je te le rendrais quand j’estimerai que tu l’auras mérité.

-T’as pas le droit, gronda Abby.

-Ooooh si jeune fille, tu vis ici, tu te plie à mes règles. Et si j’étais à ta place, je ne discuterai pas, parce que je peux te retirer ton téléphone et ton ordinateur portable.

Abby soupira et lui mit ses écouteurs et son I-pod dans sa main.

-Mais fais gaffe, me le casse pas.

-J’en prendrais soin, ne t’inquiète pas. Maintenant, nous pouvons y aller.

Abby passa la première pendant que Frank mit le I-pod de la jeune femme dans sa poche. Ils trouvèrent rapidement Claudia Joy à l’intérieur avec d’autres personnes occupées à remettre en place les tables, les chaises et bien entendu le désastre commis par Abby.

Claudia Joy s’approcha d’eux dès qu’elle les vit.

-Bonjour Frank, dit-elle en souriant.

-Bonjour Claudia Joy, désolé pour le retard, une jeune fille n’arrivait pas à se lever ce matin, ajouta-t-il en regardant Abby.

-Tu es prête à venir nous aider? Lança Claudia Joy à la jeune femme. Nous t’attendions.

-J’ai pas le choix. Si je le fais pas mon oncle va me faire entrer dans l’armée pour me traduire un cour martiale.

-Un «@oui@» aurait suffit Abby, commenta Frank.

Elle leva les yeux aux ciel et Claudia Joy la conduisit sur le lieu de l’incident. Elle lui donna un balai et un sceau. Le plus gros avait été immédiatement nettoyé pour éviter que quelqu’un ne se blesse. Mais il y avait encore fort à faire. La jeune femme se mit au travail tan bien que mal alors que Frank rejoignit la meilleure amie de son épouse.

-Encore toutes mes excuses pour hier soir Claudia Joy. Nous savions que ca pourrait être une erreur d’emmener Abby à cette soirée, j’avais seulement espéré, que peut être, elle saurait bien se tenir pendant quelques heures.

-J’ai été plutôt gênée de l’avoir vu vider une bouteille de bourbon.

-Nous l’avons tous été et elle ne perds rien pour attendre.

-Au moins, elle est prête à rattraper ses bêtises.

-Seulement parce que je l’ai forcé à le faire. Elle n’a pas conscience des conséquences entrainées par ses actes.

-Elle est jeune.

-Ce n’est pas une raison, fit Frank avec fermeté, il faut qu’elle comprenne.

-Je crois qu’elle l’a compris non?

-Je ne le parierais pas, répondit aussitôt Frank.

-Ca viendra, je suis certaine qu’elle va prendre conscience de ce qu’elle a fait et qu’elle s’excusera d’elle-même à ce moment là.

-Si elle était comme Emmalin, sans doute. Mais qu’a-t-elle dit? Que s’est-il passé?

-Elle nous a dit qu’elle l’avait trouvé à l’étage aux toilettes avec la bouteille qu’elle venait de vider. Elles ont échangés des mots et Abby est venue ici parce qu’elle voulait rentrer. Emmalin a anticipé la catastrophe et l’a suivit.

-Et la catastrophe a bien eue lieu, soupira Frank en regardant la jeune femme un peu plus loin.

Il resta silencieux un long moment avant de reprendre la parole.

-Si tu veux rejoindre ta famille, tu peux, je resterais avec Abby et je surveillerais que tout se passe bien.

-Très bien, acquiesça Claudia Joy, dans ce cas, Je vais y aller. Souhaite un bon dimanche à Denise de ma part.

-Je le ferai, merci, bon dimanche Claudia Joy, répondit Frank avant de s’éloigner vers sa nièce.

Claudia Joy le regarda un instant avant de donner ses dernières directives par-ci par-là et de rentrer chez elle.

Abby nettoyait depuis une bonne heure déjà, Frank toujours debout à côté d’elle sans bouger d’un pouce. Elle soupira profondément et lui accorda un immense sourire.

-J’ai fini.

Frank ausculta avec soin l’endroit qu’elle avait nettoyé depuis un long moment et il fit une grimace qui n’échappa pas à Abby.

-Quoi, grommela-t-elle.

-Je trouve que ce n’est pas si bien fait que ça.

-Tu plaisantes? On pourrait manger par terre tellement c’est nickel.

-Moi je ne trouve pas, alors contente-toi de faire mieux que ça.

-Je crois que je suis d’accord avec maman, t’es vraiment pas cool.

-Je le serais peut être si tu n’agissais pas de cette manière.

-Ouais, tu parles.

-Commence à faire des efforts et tu verras.

-Non, parce que je suis comme je suis, et je vais pas changer pour te faire plaisir.

-Je ne compte pas changer pour te faire plaisir non plus Abby.

-J’aurais jamais dû me pointer ici, et prendre un avion pour l’autre bout du pays.

-Mais tu es venue ici et ta tante et moi nous t’avons accueillit, alors jusqu’à nouvel ordre tu vas devoir nous obéir à tous les deux, que tu le veuilles ou non. Remets-toi au boulot ou je te ramène chez ta mère.

Abby lui lança un regard noir en prenant de rage le balais. Elle frotta de longues minutes encore avant que Frank n’estime qu’elle avait parfaitement exécuté sa tâche.

Ils quittèrent ainsi enfin le complexe pour rentrer tout juste pour le déjeuner. Denise avait préparé un succulent repas que la jeune femme ne toucha presque pas, encore en colère contre son oncle. Lui, ne semblait pas se soucier un seul instant de l’état dans lequel se trouvait Abby. Mais il ne savait pas à quel point la jeune femme pouvait ruminer sa petite vengeance dans sa tête, ni même ce qui allait l’attendre dans les prochains jours.

@

Abby vivait déjà depuis plus d’une semaine sur la base. Elle avait eu le temps de goûter aux délicieux repas de Denise, de se disputer une dizaine de fois avec Frank et de casser un vase en cristal de Baccarat. Denise l’avait enfin prié d’aller faire un tour pendant qu’elle allait voir ses amies. Elle ne voulait plus de la «@tornade Abby@» dans son salon le temps d’une après-midi. Mais elle lui demanda tout de même de garder son téléphone sur elle et de ne pas quitter la base sous peine de devoir régler des comptes avec son oncle. Denise partit la première. Abby en fit de même trente minutes plus tard, changée et maquillée. Elle devait rentrer une demi heure avant sa tante afin de se changer et se démaquiller. Elle prit un sac où elle fourra un peu d’argent, son téléphone, du maquillage et deux bières subtilement piquées dans le réfrigérateur. Il faisait chaud ce jour là et Abby en simple short cour et top dégageant largement ses épaules, sortit de la maison comme une voleuse. Elle marcha un long moment avant d’entendre un bruit de ballon un peu plus loin. Elle se dirigea avec légèreté et souplesse vers le terrain de basket. Deux jeunes soldats y jouaient sans faire attention à sa présence. Elle s’assit sur une table en bois un peu plus loin sans cesser de les regarder. Abby avait la furieuse envie de mettre ses écouteurs sur les oreilles, mais elle se souvint douloureusement que son oncle ne lui avait toujours pas rendu ce qui était sans doute son meilleur ami. Elle soupira profondément en jetant sa tête en arrière. Le ballon cogna contre son pied et elle regarda aussitôt le jeune homme qui arrivait à sa hauteur.

-Hey, lança celui-ci, salut ma belle, t’es perdue?

-Ca va faire une demi-heure que je poireaute là pour que ton copain et toi veniez me demander de jouer avec vous, rétorqua Abby.

-Jouer avec nous? Tu plaisantes? Il nous faudrait une bonne raison.

-Une bière chacun et on se fait un tournoi, un contre un.

-C’est quoi le pari?

-Aucun, juste pour le plaisir de vous mettre la raclée de votre vie.

-T’entends ça Jack? Cria celui qui c’était approché de la jeune femme. Elle veut jouer avec nous pour nous mettre la raclée.

Il rit en approchant à son tour.

-J’ai entendu parlé de bières.

Abby sourit et fouilla dans son sac. Elle leur tendit en souriant. Mais au moment où ils voulaient les prendre, elle se ravisa.

-Les bières si je peux jouer, sinon je les descends moi-même.

Les deux hommes échangèrent un regard avant d’acquiescer au même moment. Abby leur donna la bière qu’ils ouvrirent avec facilité et burent tranquillement.

-C’est quoi ton nom? Lança celui qui s’appelait Jack.

-Abby.

-Pierce, grommela l’autre avant de boire une autre gorgée.

-Abby comment? Reprit le premier.

-Abby tout court, t’as pas besoin d’en savoir plus.

-Je me renseigne, je voudrais pas ridiculiser la fille d’un officier, dit-il en riant suivit par l’autre.

-Tu crains rien, Jack, répondit Abby.

-Ok, bon alors je finis ma bière et je joue contre toi en premier ça te va?

-Je suis là pour ça, je te fais dire, rétorqua la jeune femme.

Les deux jeunes hommes finirent leurs bières et le premier entama la partie avec la jeune femme. Il se passa de nombreuses minutes où il avait l’avantage, mais rapidement, la situation s’inversa et Abby gagna la première manche. Grande et fine, elle pouvait facilement passer entre les mailles du filet. En revanche, elle perdit contre son autre adversaire, qui gagna le match contre son ami. Elle dû donc livrer bataille avec rage pour obtenir la victoire de trois petits points.

-Comment t’as fait? Soupira Pierce en reprenant son souffle.

-Je vais te dire un secret, je suis championne de basket féminin, répondit Abby dans le même état.

-Tricheuse, grommela le jeune homme en souriant.

Abby lui sourit en retour et ils s’assirent tous les trois à la table en bois. Ils lui offrirent de l’eau et ils discutèrent quelques minutes avant que d’autres jeunes gens n’approchent.

-Hey les gars, lança Jack, ça vous dit un match.

-Pourquoi pas, le perdant paie la tournée? Fit un autre.

-Un peu ouais. Tu viens Abby?

-Quoi, je peux jouer?

-Ouais, reprit Jack, dans notre équipe.

-Et pour le verre?

-Ce sera du coca pour toi, ajouta Pierce en riant.

-Sympa les mecs, grommela la jeune femme.

Ils se mirent tous sur le terrain et disputèrent un match haut en couleur. Il n’y avait que deux filles, une par équipe pour les équilibrer. Mais alors que le match touchait à sa fin, une voix grave se fit entendre un peu plus loin. Les soldats cessèrent de jouer et se tournèrent vers l’officier qui approchait. Frank lançait un regard noir à Abby qui soupira profondément.

-Repos, murmura le Lieutenant-colonel, aux jeunes hommes avant de se tourner vers sa nièce. Tu peux me dire ce que tu fais ici? Dans cette tenue?

-J’ai eu l’autorisation de Denise, murmura Abby.

-De sortir comme ça, ça m’étonnerait et ça doit faire plus de deux heures qu’elle te cherche.

-J’ai pas une montre dans la tête, répondit Abby en levant les yeux aux ciels.

-Viens avec moi, lança Frank en faisant demi-tour après avoir jeté un regard noir à Jack.

Abby fit quelques pas pour récupérer ses affaires et se tourna vers ses nouveaux amis.

-On s’appelle pour une revanche, dit-elle en faisait un clin d’œil avant de suivre son oncle.

Une fois dans la voiture, Frank soupira profondément en la regardant.

-Il manque deux bières dans le réfrigérateur, murmura-t-il calmement.

-Tu les comptes?

-Après t’avoir vu vidé la bouteille de bourbon, je te surveille.

-Je ne les ai pas bues.

-A d’autres Abby, répondit Frank en démarrant.

-Je te le jure.

-Et donne moi ton téléphone, jusqu’à nouvel ordre tu en es privé.

-S’il te plait, crois-moi, je n’ai pas bu ces bières, ce sont les deux types avec qui je jouais au basket, je leur ai donné pour qu’ils me laissent faire une partie.

-Abby, ton téléphone, répéta Frank en tendant la main.

-C’est de l’injustice, je te le donne pas, grommela-t-elle en faisant la moue.

-Il serait mieux pour tout le monde que tu me donne ce téléphone.

-Sinon quoi? Tu vas appeler ma mère?

-Comptes sur moi je trouverai quoi faire.

Abby ne répondit pas mais elle plongea son regard dans celui de son oncle. Elle y vit toute la détermination qu’elle connaissait bien et une pointe de colère traverser son regard bleu. Elle finit par baisser les yeux et fouilla dans son sac avant de lui donner son téléphone à contre cœur. Frank le prit et le rangea dans sa poche avant de démarrer et de ramener la jeune femme à la maison.

Une fois rentrés, Denise cru faire une crise cardiaque en voyant sa nièce. Jamais elle n’avait pu penser qu’elle pouvait sortir encore moins vêtue que la semaine précédente. La jeune femme s’excusa auprès de sa tante avant de filer se changer dans la chambre. Mais même si Frank n’avait rien dit, Denise avait soupçonné que la consigne venait de lui. Il demeurait cependant silencieux et renfermé. Frank alla bricoler dans le garage sur la moto, pendant que Denise mettait un peu d’ordre dans la maison. Abby quand à elle ne sortit pas de la chambre avant que sa tante ne l’appelle pour le dîner. Mais l’ambiance resta néanmoins tendue à table. Personne ne parlait, seuls les bruits des ustensiles résonnaient dans la maison. Frank avait à peine prononcé quelques mots depuis leur retour et Denise n’avait rien osé demander. Elle savait aussi que si son mari voulait lui parler, il le ferait à un moment ou à un autre.

Ils avaient eu l’intention d’aller voir un film au cinéma ce soir là, mais après la frayeur que leur avait fait Abby, ils avaient changés d’avis. Ils étaient donc restés chez eux mais pas plus tranquilles pour autant.

La jeune femme jouait avec un jeu vidéo appartenant encore à Jeremy dans la chambre voisine, alors que le couple était déjà couché depuis un moment.

-Tu devrais dormir Frank, grommela son épouse en se blottissant contre lui.

Il referma ses bras autour de Denise sans fermer un œil pour autant.

-Je préfère attendre que Abby dorme. Je ne veux pas qu’elle parte ce soir. Elle a rencontré des soldats sur la base et Dieu sait ce qu’elle va faire.

-Tu ne vas pas veiller toute la nuit, murmura Denise avec fatigue.

-Je le pourrais.

-Alors ferme la porte à clé et cache la, répondit Denise en mettant son visage dans le cou de son époux.

-Je l’ai fait, répondit aussitôt Frank.

-Chéri, s’exclama Denise en se redressant subitement et en ancrant son regard dans le sien, tu ne crois pas que tu exagère?

-Non. Lorsque tu m’as téléphoné pour me dire que tu n’arrivais pas à la joindre et qu’elle était partie avec ses papiers et de l’alcool, j’ai crû devenir fou. J’ai eu l’impression d’avoir perdu une petite fille dans un centre commercial la veille de Noël.

-Je comprends que tu t’inquiète, mais Frank, Abby n’a plus cinq ans et elle n’est pas notre fille.

-Ca ne fait aucune différence pour moi. Personne ne semble se donner la peine de veiller sur elle.

-A part toi, ajouta Denise en plongeant son regard dans le sien.

-Je dois le faire Denise, Anny et James semblent si désintéressés que ça me met hors de moi. Ils ne voient pas que leur fille a des problèmes.

-Je sais.

-Je ne vais pas la laisser foutre en l’air sa vie, je tiens beaucoup trop à elle.

-Je le sais aussi, répondit Denise en riant doucement, et quel est ton plan soldat?

-Je voulais te demander de m’aider.

-Qu’est-ce que je peux faire?

-Je comprendrais que tu ne sois pas d’accord mais…

-Dis-moi, coupa Denise, j’ai autant envie d’aider notre nièce que toi, alors je t’écoute.

-Elle ne va pas pouvoir rester tous les jours à la maison seule, il faudrait peut être qu’elle retourne au lycée.

-Tu ferais mieux d’oublier ça, elle s’y refuse catégoriquement et je doute que la priver de tout soit la solution.

-Alors, elle doit travailler.

-Travailler? Frank, c’est de Abby dont nous parlons, il faudrait qu’elle change d’attitude pour qu’on l’embauche quelque part.

-J’ai pensé au bar de ton amie.

-Chez Roxy? S’étonna Denise.

-Je sais qu’après le désastre de la fête de Claudia Joy, elle risque de refuser, mais je ne doute pas une seule seconde de ton pouvoir de persuasion, répondit Frank avec un large sourire.

-Crois-moi, toi tu sais parfaitement bien te servir de ton pouvoir de séduction, répondit Denise en riant. Je vais voir ce que je peux faire.

-Tu es un ange, répondit Frank avant de déposer un baiser sur ses lèvres.

-Et si ça ne fonctionne pas, que vas-tu faire?

-Je n’ai pas encore trouvé pour le moment.

-Ca viendra, j’ai confiance, le rassura Denise, tu pourras toujours me demander, on est une équipe n’oublie pas.

-Je n’oublie pas.

-Tan mieux, répondit Denise sur ses lèvres avant de l’embrasser tendrement, je n’ai plus très envie de dormir par ta faute, murmura-t-elle avant de l’embrasser à nouveau.

Alors que le baiser s’intensifia et que les corps se rapprochèrent encore, un juron leur parvint de la pièce voisine. Ils soupirèrent tous les deux longuement avant de finalement rire doucement.

-La route risque d’être longue et périlleuse madame Sherwood.

-Du moment que nous restons main dans la main, monsieur Sherwood, tout devrait s’arranger.

-Je l’espère, répondit Frank avant de déposer un baiser dans les cheveux de son épouse.

La jeune femme avait pris son service dans le bar de Roxy quelques jours plus tard. Même si la situation ne l’arrangeait guère, elle n’avait pas eu d’autre choix que de se plier à la volonté de son oncle qui se montrait intransigeant. Denise veillait cependant à rester toujours parfaitement à l’écart de leurs échanges. Mais elle n’arrivait pas à comprendre pourquoi Abby préférait rester avec eux plutôt que de rentrer chez elle où, semblait-il, elle avait nettement plus de liberté qu’ici. Il y avait quelque chose dans ses réactions qu’elle ne comprenait pas, mais elle n’en parla pas à son époux.

La journée fut mouvementée comme il se devait avec une jeune femme comme Abby. Mais après le souper, elle ne broncha cependant pas et alla rapidement dans sa chambre. Denise était endormie depuis un long moment contre Frank, lorsque celui-ci perdit le combat contre le sommeil à son tour. Il avait veillé tard, mais pas assez. La jeune femme sortit prudemment de sa chambre, sur la pointe des pieds. Elle fourra une serviette dans son sac et de son autre main, elle portait ses bottes. Elle essaya de faire le moins de bruits possible pour sortir discrètement de la maison. Une fois la porte soigneusement refermée derrière elle, elle respira enfin. Elle enfila ses chaussures et lança son sac sur son épaule avant de partir. Elle avait veillé à ne pas éveiller les soupçons sur sa prochaine destination. Elle portait une veste, fermée jusqu’au cou et un large pantalon. Abby fit rapidement le chemin jusqu’à la piscine. Elle jaugea un moyen d’y entrer. Et elle fut ravie de vivre sur une base militaire, car personne ne pouvait s’imaginer ce qu’elle s’apprêtait à faire. Elle lança son sac de l’autre côté du grillage et y grimpa. Une fois à l’intérieur de l’enceinte de la piscine, elle ramassa ses affaires et se dirigea vers le bassin. Il ne lui fallut que quelques courtes minutes avant de trouver comment ouvrir la protection. Le bassin découvert à moitié, elle enleva ses chaussures et son pantalon, puis elle ouvrit sa veste qu‘elle jeta à terre à côté de tout le reste. Simplement vêtue de sous vêtements de sport, parce qu’elle n’avait pas pensé à apporter un maillot de bain avec elle, elle regarda un instant son œuvre. Avec un sourire de malice, elle s’approcha du bassin et plongea. Elle fit quelques mouvements sous l’eau avant de remonter à la surface. Puis, elle retira son soutien-gorge en soupirant. Elle l’envoya plus loin et replongea aussitôt faire d’autres mouvements. La jeune femme n’avait pas remarqué que le haut trempé avait atterrit aux pieds d’un homme à la haute stature. Il le prit entre ses doigts et jeta un regard à celui qui l’accompagnait. Les MP s’approchèrent du bassin, là où la jeune femme allait reprendre son souffle. Ils se penchèrent vers elle lorsqu’elle remonta à la surface. Abby poussa un puissant cri de peur avant de placer ses mains devant sa poitrine nue.

-Que faites-vous ici mademoiselle?

-Euh, ce qu’on fait dans une piscine, enfin si j’étais avec un garçon, je trouverai peut être une autre occupation dans cette piscine, mais là, toute seule, je nageais, pourquoi?

-Veuillez sortir de cette piscine mademoiselle, reprit l’homme avec sérieux.

-Ca va pas la tête, retournez-vous d’abords. J’ai pas envie que vous me matez.

-Quel est votre nom?

-Quoi? encore? C’est une technique de drague chez tous les militaires ou quoi?

-Nous sommes de la police militaire, ce que vous venez de faire est une infraction.

-Vous allez m’emmener en taule? Grommela la jeune femme.

-Vous allez me dire votre nom, ou vous devrez attendre dans cette tenue jusqu’au moment où l’on viendra vous chercher.

-Si je vous dit pas mon nom, vous ne saurez pas qui appeler, répondit Abby en riant.

-Abby Lewis, lança l’autre un peu plus loin après avoir regardé la carte d’identité de la jeune.

-Si seulement tonton m’avait pas pris ma carte d’identité, soupira la jeune femme en faisant la moue.

-Sortez de cette piscine mademoiselle Lewis, reprit le MP qui se trouvait à côté de la jeune femme.

-Vous pouvez au moins me passer la serviette qui est dans mon sac? Se serait sympa soldat.

Celui-ci soupira et prit la serviette que lui tendait son collègue avant d’en faire de même à Abby.

-Ne faites pas de bêtises, murmura-t-il à son attention.

-Vous croyez que je vais passer par le filtre au fond du bassin?

L’homme ne répondit pas et fit un signe à l’autre avant qu’ils ne se retournent tous les deux. Abby sortit de la piscine et noua solidement la serviette autour de sa poitrine. Elle n’avait pas remarqué qu’elle était aussi courte, et il ne lui était pas venue à l’idée une seule seconde qu’elle aurait de la compagnie. Elle soupira et laissa tomber les bras le long de son corps.

-C’est bon.

Les deux hommes se tournèrent vers elle à nouveau et elle prit son soutien-gorge encore imbibé d’eau.

-Bon, et on fait quoi maintenant, soupira la jeune femme, vous m’amenez dans une cellule pour la nuit?

-Vous n’êtes pas majeure.

-Ben, ça dépend la carte d’identité que vous regardez en réalité.

-Sur celle-ci vous ne l’êtes pas, ajouta l’homme qui tenait toujours ses affaires.

-Bon et alors? Ca change quelque chose?

-Nous allons appeler vos parents et ils vont devoir venir vous chercher ici.

-Ils sont a Pittsburg mes parents, ils viendront pas pour si peu, mon oncle par contre, il risque de criser et de débarquer.

-Quel est le nom de votre oncle?

-Le Lieutenant-colonel Frank Sherwood et vous cassez pas la tête pour trouver son numéro, je le connais par cœur, ajouta Abby en souriant largement.

Les deux hommes échangèrent un regard avant d’acquiescer.

Le téléphone sonna plusieurs fois avant que Frank ne décide de tendre le bras dans sa direction. Toujours parfaitement bien calée dans le creux de ses bras, Denise émit un grognement avant de plonger la tête vers le torse de son époux. Celui-ci se redressa et passa au-dessus de Denise pour se saisir du combiné et le porter à son oreille alors que Denise ouvrit ses yeux.

-Lieutenant-colonel Sherwood.

-….

-Mmh, où?

-….

- Très bien, soupira-t-il.

-….

-Oui, j’arrive.

Il raccrocha alors que Denise le regardait avec une totale incompréhension. Elle posa ses mains sur le torse de Frank et capta son regard.

-Quelque chose ne va pas? Dit-elle avec inquiétude.

-C’est Abby, répondit Frank en s’éloignant.

-Abby dort, comment…

-Elle est à la piscine de la base, la coupa Frank en se levant, elle y est entrée par effraction pour s’y baigner, continua le Lieutenant-colonel tout en s’habillant, je dois aller la chercher.

Denise se redressa sur ses avant bras sans pour autant quitter des yeux son époux déjà habillé qui s’approchait d’elle à nouveau.

-Je viens avec toi, lança Denise en voulant se lever.

Mais la main de Frank se posa sur la sienne avant qu’il ne prenne la parole.

-J’y vais, reste là et dors chérie, tu travailles tôt demain.

-Tu ne veux pas que je t’accompagne?

-Je pourrais gérer ça tout seul, rendors-toi, murmura Frank sur les lèvres de Denise avant de l’embrasser, je reviens très vite.

-Très bien, répondit Denise en se couchant à nouveau.

Il déposa un autre baiser dans ses cheveux et se releva, lâchant la main de la jeune femme au dernier moment, avant de quitter la pièce. Il prit la voiture et fit rapidement le chemin jusqu’à la piscine. Il y vit du monde, une dizaine de personnes tout au plus, mais que pouvaient-ils bien faire à une heure aussi tardive ici? Il entendit des mots sur son passage: un noyé, des bouteilles d’alcool. Frank accéléra le pas afin d’en avoir le cœur net. Mais il vit Abby entourée par deux MP, lui souriant largement de ce sourire d’excuses qu’il connaissait bien. Elle portait à la main un pantalon rapiécé ainsi que des sous vêtements encore humides.

-Abby, gronda Frank, tu pourrais te rhabiller.

-C’est encore mouillé, murmura la jeune femme.

-Je m’en fiche, arrête de te donner en spectacle, dit-il en lui faisant les gros yeux.

Abby fit une grimace et passa son pantalon pendant que Frank s’entretenait avec les deux policiers.

-Que s’est-il passé?

-Il semblerait que votre nièce soit entrée dans l’enceinte de la piscine pour nager.

-Parce qu’il n’y avait pas de garçon, lança plus loin la jeune femme, sinon j’aurais…

-Abby, n’en rajoute pas, grommela Frank sans la regarder alors qu’elle lui tirait la langue, qu’a-t-elle fait?

-En dehors de se baigner à moitié nue dans une piscine sur une base militaire à deux heures du matin, rien monsieur.

-Il n’y avait personne avec elle? Pas d’alcool?

-Non monsieur, étant mineure, nous devions faire appel à vous, mais ça n’ira pas plus loin si vous ne le voulez pas.

-Très bien, dans ce cas, merci messieurs, Abby, ajouta Frank en se tournant vers elle, rentre immédiatement, tu t‘en sors à bon compte pour cette fois.

Abby fit un bref salut militaire que le Lieutenant-colonel n’apprécia guère. Il lui enfila avec force sa veste et la ferma jusqu’au cou avant de lui prendre la main et de l’entraîner à sa suite.

-Hey doucement, ronchonna la jeune femme.

-Abby je suis épuisé, répondit Frank en se tournant vers elle, qu’est ce que tu avais encore besoin de te faire remarquer?

-Je ne me suis pas fais remarquer, moi ça m’aurait pas dérangé qu’ils me laissent tranquille.

-Mais qu’est-ce qu’on va faire avec toi, soupira Frank en passant sa main dans les cheveux.

Il frotta un instant sa nuque avant de la regarder à nouveau tout en pinçant les lèvres, adossé contre la voiture.

-Tu les accumule Abby, reprit Frank.

-Je fais pas exprès, je m’ennuie ici.

-Tu travaille chez Roxy et c’est toi qui a voulus venir.

-Ouais, mais j’ai pas d’amis.

-La fille Holden?

-Tu parle, cette fille à papa, j’ai pas envie de côtoyer cette gourde, rétorqua la jeune femme en levant les yeux au ciel.

Frank ne répondit pas et Abby lui fit une moue qu’elle maîtrisait à la perfection. Il ne pu s’empêcher de sourire, même s’il ne l’avait pas voulu. Abby en fit de même et déposa un baiser sonore sur sa joue.

-Je suis en colère contre toi, dit Frank en la désignant de l’index, tu vas être punie, tu entends?

-Oui, acquiesça Abby.

-Allez on rentre, murmura Frank en lui ouvrant la portière.

Abby s’assit à l’intérieur de la voiture, mais avant de la refermer, Frank se pencha vers elle une fois encore.

-Comme punition: interdiction de te repeindre le corps, c’est clair?

-De quoi tu parle?

-Ne me dis pas que tu croyais que je n’avais pas remarqué ton manège? L’encre a coulé Abby, tes tatouages ne sont pas vrais, alors interdiction de les refaire, même si ce sont des faux. Et surtout, interdiction de les faire en vrai.

-Ca fait un mal de chien, je suis pas dingue. J’en ai qu’un vrai. J’ai eu tellement mal que j’ai cru mourir, alors je vais pas en faire d’autres.

-Où est ce tatouage ?

-Tu crois pas que c’est une question intime là?

-Tu n’as pas beaucoup caché de ton intimité ce soir, jeune fille, rétorqua Frank.

-La cheville, c’est le seul, soupira Abby.

-Pourquoi nous avoir fait croire que tu en avais tellement?

-Bon, c’est fini l’interrogatoire là? Je croyais que tu étais crevé.

-Ne m’oblige pas à te reposer cette question.

-Comme ça, d’accord?

-Tu appelles ça une réponse? Lança Frank en riant.

-Je voulais juste savoir ce que ca faisait, c‘est tout, s’impatienta la jeune femme.

-Admettons, murmura Frank, on va dire que je te crois, ajouta-t-il avant de fermer la porte.

Il ne voulait pas lâcher l’affaire aussi facilement, mais cela ne servait à rien d’insister, car il savait que s’il le faisait, il repousserait Abby à se réfugier dans ses retranchements. Et même s’il était en colère, blasé, fatigué et résigné face à la jeune femme, il était soulagé que toutes les marques qui jalonnaient le corps de sa nièce n’étaient que les dessins d’une ado un peu perdue.

 


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